ORDRES ET DECORATIONS DE L’EMPIRE CHERIFIEN

AVANT-PROPOS

étudier les ordres et les décorations d’un pays, c’est contribuer à l’étude de son histoire sur une période déterminée. En effet, les ordres et les décorations apparaissent et disparaissent dans un pays, au gré des événements socio-politiques qui ponctuent son histoire. Le Maroc n’a pas échappé à cela. La phaléristique de l’Empire Chérifien sous Protectorat de la République française, outre le fait qu’elle permet de rappeler les mérites et le dévouement de celles et ceux qui ont porté ces décorations, reflète l’évolution militaire, civile et politique de ce merveilleux pays qui, de 1912 à 1956 a été placé sous la protection de la France.

S’il existe plusieurs traités de numismatique chérifienne, aucune étude de phaléristique chérifienne n’a jamais été réalisée jusqu’à présent. Certains ouvrages généralistes sur les ordres et les décorations de France et des colonies ont évoqué la question, mais jamais en profondeur, ni de façon exhaustive, et souvent avec des erreurs d’appellation et de datation.

Les ordres et les décorations attribués dans l’Empire Chérifien de 1912 à 1956, sont par la beauté des objets, un résumé élégant de l’histoire commune du Royaume chérifien et de la République française durant presque cinq décennies. Cette histoire commune a ses détracteurs de part et d’autre.

Notre objectif n’a pas été, en effectuant ces longues et patientes recherches, de porter un jugement quelconque sur les événements constituant cette histoire, ni bien sûr de blâmer les uns ou de louer les autres. Les faits politiques et militaires, devenus historiques aujourd’hui, ont été ce qu’ils ont été. Quels qu’en furent à l’époque les mobiles, ils ne doivent pas faire oublier les millions de Marocains et les centaines de milliers de Français qui, par amour du Maroc, se sont dévoués au service de la construction de ce pays, dans un élan partagé de générosité humaine. C’est pour tous ceux l à qu’ont été créées ces décorations, ces  » parures d’honneur et de gloire  » , venues récompenser leur dévouement, souvent leur sacrifice, dans de belles activités humaines au service de notre histoire franco-marocaine. Quelles qu’en soient les interprétations et les récupérations du moment, nul ne pourra jamais nous enlever, à nous qui nous sommes enrichis de nos cultures respectives, ces pages d’une histoire commune qui se prolonge encore aujourd’hui dans l’attachement que nos deux peuples ont toujours l’un pour l’autre.

Si l’essentiel de l’ouvrage est consacré aux ordres et décorations spécifiques à l’Empire Chérifien sur la période 1912-1956, il nous a paru indispensable d’évoquer en amont et en aval du cœur de cette recherche, les décorations créées ou attribuées lors des diverses  » campagnes du Maroc  » qui ont servi à sa conquête d’abord, à sa pacification ensuite, au maintien de l’ordre enfin à l’occasion de son accession à l’indépendance.

Pour les décorations spécifiquement chérifiennes, afin d’être le plus complet et le plus précis possible, notre méthode de recherches a été fondée sur une exploitation systématique et exhaustive de l’ensemble de la collection des  » Bulletins Officiels du Protectorat de la République française au Maroc « , du n % 1 (Première année) du 1er novembre 1912 au n % 2262 (Quarante-cinquième année) du 2 mars 1956. Afin de replacer le plus objectivement possible les textes officiels de création, réglementation et modification des décorations, dans leur contexte politique et historique fondateur, nous nous sommes référé à un grand nombre d’ouvrages historiques sur cette période, ouvrages écrits tant par des Marocains que par des Français, et publiés tant au Maroc qu’en France.

Pour les insignes en eux-mêmes et leur fabrication, deux très anciennes et très prestigieuses Maisons nous ont aidé dans nos recherches, malgré la charge écrasante qui pèse sur ces Maisons devenues aujourd’hui de très grandes entreprises modernes.

Nous adressons aussi nos remerciements aux Conservateurs de nos Musées Militaires, lieux de mémoire indispensables dont les inépuisables collections de souvenirs sont une source d’informations intarissable, ainsi qu’aux organismes qui nous ont aidé dans nos recherches, tels l’Union Nationale des Officiers de Réserve, la Direction Nationale de la Garantie et des Services Industriels, l’Administration des Monnaies et Médailles, notamment le Club Français de la Médaille, ou la Chambre Syndicale Nationale de la Bijouterie, Joaillerie, Orfèvrerie.

Nous exprimons notre gratitude à un collectionneur lorrain qui se reconnaîtra ainsi qu’ à certains membres de l’association SALAM, amicale des anciens des lycées et collèges français du Maroc, qui ont bien voulu nous envoyer quelques précieux documents illustrant l’ouvrage.

Nous avons dans cet ouvrage, volontairement employé un système de transcription phonétique qui, s’il n’est pas savant et s’il ne respecte pas les conventions de la codification internationale aujourd’hui établie, permet la reconstitution intégrale des mots arabes, et ne dépayse pas le lecteur non arabisant. Pour la transcription des mois du calendrier islamique, nous avons adopté la terminologie marocaine utilisée de 1912 à 1956 dans tous les textes du Bulletin Officiel du Protectorat.

Pour les textes en langue arabe, qui se lisent de droite à gauche, nous avons ignoré les quelques erreurs orthographiques et grammaticales que nous avons trouvées sur les décorations chérifiennes, notamment sur celles du début de la période du Protectorat. Ces erreurs sont, selon nous, davantage dues à un souci d’utilisation esthétique des espaces épigraphiés, qu’à une ignorance de l’orthographe et de la grammaire arabes par les fondateurs de ces ordres et de ces décorations, et par les créateurs des insignes.