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HISTOIRE DE L’ORDRE DE SAINT-LAZARE

LES ORDRES DÉCORATIONS ET SCEAUX DE SAINT LAZARE DE JERUSALEM ET DE NOTRE DAME DU MONT CARMEL AUX XVIIE ET XVIIIE SIÈCLES -

« Les ordres de Saint-Lazare de Jérusalem et de Notre-Dame du Mont-Carmel aux XVIIème et XVIIIème siècles ».

Cette dénomination est en réalité incomplète, l’exacte appellation en est « Ordres royaux, militaires et hospitaliers de Saint-Lazare de Jérusalem et de Notre-Dame du Mont-Carmel ». En effet, il s’agit de l’union de 2 ordres : « l’ordre hospitalier et militaire de Saint-Lazare de Jérusalem » et celui de « la Milice ou Ordre militaire de la Vierge Marie ou de Notre-Dame du Mont-Carmel ».

Si le premier est de très ancienne origine, le second a été créé en 1607 par Henry IV. Tous deux furent d’abord réunis par le fait qu’ils eurent le même grand-maître, un brillant homme de guerre de très ancienne noblesse auvergnate: Philiberg de Nerestang.

L’union des deux ordres, proclamée en octobre 1608 par le Roi, ne fut reconnue par le Saint-Siège que par l’intermédiaire du cardinal de Vendôme légat « a latere » de Clément IX, le 5 juin 1608.

Pour comprendre cette prudence de la papauté, il faut se référer à l’histoire et à la constitution des deux ordres ainsi unis mais qui avait, chacun d’entre eux, leur originalité et leur spécificité propres jusqu’à ce que, à l’initiative du comte de Provence, le futur Louis XVIII, alors grand-maître en cette fin du XVIIIe siècle, leurs destinées à nouveau se séparent : Saint-Lazare étant réservé à la très vieille noblesse et aux officiers généraux, le Mont-Carmel aux meilleurs élèves de l’école Royale Militaire de Paris.

L’ORDRE HOSPITALIER ET MILITAIRE DE SAINT-LAZARE DE JÉRUSALEM AVANT LE XVIIe SIèCLE.

L’Ordre de Saint-Lazare, comme l’écrit M. de La Roque, « prend son nom de Lazare qui fut ressuscité par Notre-Seigneur, comme il se voit dans l’évangile de saint Jean ».

Aussi, les lépreux ou ladres l’ayant pris pour patron, on a communément appliqué aux maisons de l’ordre de Saint-Lazare : « le titre de maladrerie, léproserie, ladrerie, lazaret, ou maison de Saint-Lazare. »

En effet, « ceux qui étaient infectés de cette maladie contagieuse étaient séparés des autres personnes selon la loi de Dieu. Et ils devaient demeurer hors des villes, suivant la loi établie en Samarie, rapportée par Joseph en ses Antiquités Judaïques. Les lépreux étaient tenus par les règlements de ce Royaume, de prendre la qualité de « ladres » dans les actes publics qu’ils passaient, et il leur était défendu d’aspirer à aucune charge publique, dont ils devaient se démettre en cas qu’ils en fussent pourvus. »

Il ajoute : « que les auteurs qui ont écrit de l’ancienneté de cet ordre, en établissent le dessein et le fondement dès le premier concile célébré à Jérusalem par les apôtres avant leur séparation l’an 34 de la naissance de Jésus-Christ; ou après qu’ils eurent ouï les plaintes qui étaient faites sur l’administration des aumônes, et qu’ils eurent considéré que la prédication de la parole de Dieu ne leur permettait pas de vaquer aux ministères extérieurs et aux secours que la miséricorde doit au prochain, ils jugèrent à propos de s’en décharger, comme il est porté dans les Actes des Apôtres. Et pour cet effet, ils élurent en même temps indifféremment du nombre des juifs et des gentils, des personnes illustres en vertu, comme Saint Etienne, Philippe, Procore, Nicanor, Timon, Parminas et Nicolas d’Antioche, auxquels ils confièrent la recette et la disposition des charités publiques et généralement tous les exercices des oeuvres de miséricorde. Tellement qu’on peut compter ceux-ci sous les premiers hospitaliers de la Religion qui a depuis porté le nom de Saint-Lazare.

« Plus raisonnablement, on peut penser que cet ordre, comme les autres, naquit en Palestine pendant les croisades, qu’il était d’abord uniquement religieux, et qu’il ne semble s’être adjoint une milice que vers l’an 1200. Cela n’est cependant pas contradictoire avec la déclaration de Louis XIV de décembre 1672 affirmant: « que l’ordre de Saint-Lazare de Jérusalem est le plus ancien de toute la Chrétienté ».

Cette affirmation peut s’appliquer à son action hospitalière à l’égard des lépreux. D’ailleurs l’ordre en compta parmi ses premiers membres, en particulier le Bienheureux Gérard Tenque, son grand-maître, et Roger Boyant, ancien recteur de l’hôpital Saint-Jean. Il semble en effet que l’ordre eut comme mission à la fois de soigner les lépreux et de recevoir en son sein les membres des différents ordres atteints par ce fléau.

Son organisation, en tant qu’ordre militaire, semble ainsi avoirété plus tardive que pour les autres ordres comme ceux du Temple, des Hospitaliers de Saint-Jean et des chevaliers teutoniques. Néanmoins, en 1244, leurs chevaliers participèrent au combat de Gaza où ils furent massacrés; plus tard, ils furent aux cotés de Saint Louis à Mansourah.

Leur action semble toutefois avoir eu surtout pour objet le soin des lépreux, si nombreux alors dans tout l’Orient et notamment en Palestine et en Syrie. Aussi le Roi de France Louis VII, de retour de croisade, leur aurait-il confié la direction des maladreries du royaume.

Les membres de l’ordre reçurent d’abord à Paris, la charge de l’hôpital pour les lépreux, puis le domaine de Boigny près d’Orléans qui fut la première commanderie de l’ordre et qui devint son siège à la fin du XIIIe siècle. Alors, après la perte de la Terre Sainte et l’occupation de Saint-Jean d’Acre, les chevaliers se retirèrent en Europe d’autant que Saint Louis, confirmant leur rôle hospitalier, leur aurait confié l’administration de toutes les maladreries du Royaume dont le nombre était supérieur à deux mille.

Outre les lépreux, ces établissements accueillaient les autres malades et les pèlerins. Du XIIe au XVe siècles les dons affluèrent. Les papes, notamment Jean XXII, Grégoire X, Paul II et Urbain VI, le favorisèrent de leurs grâces et privilèges, et les rois de France prirent l’ordre sous leur protection suivant les lettres patentes de Philippe le Bel en date de Juillet 1308, lui épargnant ainsi le sort de l’Ordre du Temple.

La fin du XVe siècle et le XVIe siècle furent des périodes de vicissitudes. En effet outre « la forme de gouvernement de l’ordre qui avait été observée jusqu’alors », son organisation se trouva relâchée, par les « malheurs du temps et par l’instabilité de toutes les choses humaines qui ne sauraient longtemps subsister dans la perfection; les frères de cet ordre prenant la liberté de se marier, se prévalurent de la négligence que l’on apportait à maintenir les biens vacants de l’ordre et à y pourvoir des sujets capables: ce qui leur donna lieu de transférer dans leurs maisons profanes celles de la Religion et de se les rendre héréditaires ».

L’ordre était en profonde décadence lorsque les turcs prirent d’assaut Constantinople. Le Saint-Siège chercha alors à rassembler les forces de la Chrétienté pour les repousser et mettre un terme aux razzias, si ce n’est à relancer la reconquête de la Terre Sainte et de Jérusalem. A cette fin, les papes pensèrent regrouper les ordres militaires et religieux, ce fut l’objet d’une bulle de Pie II, de celles d’Innocent VIII en 1485 et de Jules II en 1505, les deux dernières prévoyaient l’union de l’ordre de Saint-Lazare avec celui de Saint-Jean de Jérusalem.

En France, il fallut l’arrêt du parlement de Paris en date du 1er Mars 1547, puis la décision d’Henri III nommant Aimar de Chartres grand-maître, pour éviter une fusion avec l’ordre de Malte, fusion que ce dernier roi avait paru souhaiter au début de son règne en 1576.

Le maintien et l’indépendance de l’ordre étaient ainsi assurés en France, l’empereur Charles Quint l’obtint dans le royaume de Naples et de Siciles, le roi d’Espagne Philippe II également, en même temps qu’il obtint la nomination d’un de ses sujets, Jeannot de Castillon, comme grand-maître, même si ce dernier ne fut reconnu que dans lesétats de Philippe II.

Castillon mourut à Verceil, ville du Piémont où le duc de Savoie l’avait « gracieusement » attiré, ce qui autorisa ledit duc à demander au pape d’unir l’ordre à celui de Saint-Maurice qu’il venait de fonder avec son accord, et de lui concéder la charge de grand-maître qu’il rendrait héréditaire dans sa famille. Enéchange, celui-ci promettait d’établir les chevaliers à Turin et à Nice et, en ce dernier lieu, d’y entretenir deux galères armées contre les pirates et barbaresques. Grégoire XIII accepta ses demandes en Novembre 1572, mais sa nomination en temps que grand-maître ne s’avéra effective que dans sesétats.

Quelques mois auparavant, le 7 Octobre 1571, la victoire de Don Juan d’Autriche à Lépante sur les Turcs, avait sauvé la Chrétienté, mais un autre danger commençait à l’ébranler : les guerres de religion dont l’ordre de Saint-Lazare allait être aussi la victime.

En effet, les biens d’église et ceux des ordres religieux et militaires furent la proie des protestants. Ainsi furent-ils la base de la fortune de la maison de Hohenzollern lorsqu’Albert de Brandebourg sécularisa en Prusse les biens de l’ordre Teutonique dont il était le grand-maître.

Le même processus, souvent moins brutal certes, eut lieu dans des états devenus protestants tant dans le Saint-Empire qu’en Angleterre et en Suisse. Dans les régions catholiques, les souverains se prévalurent d’un rôle de protecteur et les utilisèrent pour s’assurer une clientèle ou « doter » de bons serviteurs tout en s’émancipant des tutelles extérieures : papauté pour les terres d’église, maîtrise générale pour les biens des ordres. L’ordre de Saint-Lazare dont le nombre des maisons aurait atteint le chiffre de 3000 en Europe, fut la proie des usurpations et la France, qui était le siège du grand-maître, vit son influence s’estomper. Cependant, grâce à la protection royale, l’ordre ne disparut pas et ne fusionna pas avec l’ordre de Malte. Il faudra toutefois attendre le règne d’Henri IV pour que l’ordre renaisse. En effet depuis 1585, aucun chapitre n’avait été réuni, le nombre de ses chevaliers se réduisait à moins d’une dizaine et son patrimoine avait été dissipé au point que Pierre de Belloy fit admettre de recevoir dans l’ordre ceux qui avaient usurpé ses biens, outre les nobles à titre de chevalier, les membres du tiers état à titre de frères servants.

En 1604, la nomination comme grand-maître, de Philibert de Nerestang, fils d’un ancien ligueur rallié à Henry IV, allait permettre de relever l’ordre malgré l’opposition du pape qui ne voulut pas accepter la collation et la nomination du grand-maître sans son accord.

La création de l’ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel par Henri IV en accord avec le Saint Siège, la nomination du Marquis de Nerestang comme grand-maître de l’ordre, le 4 Avril 1608, et la confirmation du pape permirent de trouver une solution, d’autant que le 31 Octobre 1608, le roi avait uni les 2 ordres. Mais le Saint Siège n’accepta « officiellement » cette union que le 5 Juin 1668 par l’intermédiaire de son légat, le cardinal de Vendôme. Lors de cette union, l’ordre de Saint-Lazare apportait, outre un passé prestigieux, un patrimoine riche en droits.

En outre le Roi de France, protecteur des ordres voulait en faire un vivier de bons serviteurs et tout particulièrement de soldats courageux et dévoués à l’exemple des Nerestang qui, successivement de 1608 à 1667, en furent les grands-maîtres et se signalèrent par leur fidélité et leur courage au combat. Jusqu’à l’union des ordres en 1608, les chevaliers de Saint-Lazare, qui avaient comme couleur distinctive le vert (sinople, en héraldique), portaient une croix verte de forme carrée sur le devant de leur vêtement et sur le côté gauche de leur cape; au XVIe siècle, le principal changement n’avait concerné que cette croix qui fut bordée de blanc et dont la forme se rapprocha de celle de l’ordre de Malte.

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REMARQUES SUR LA NOBLESSE

REMARQUES SUR LA NOBLESSE

I – Antoine Maugard

Antoine Maugard naquit le 17 août 1739 à Château-Voué dans le diocèse de Metz. Très tôt, il s’intéressa au droit et à la jurisprudence et montra un grand souci de la précision ainsi qu’une grande perspicacité dans la recherche et l’interprétation des documents anciens.

Après avoir achevé son droit à Paris, il fut nommé commissaire du Roi pour la recherche et la vérification des anciens documents de droit et d’histoire, activité qui correspondait à sa formation et ses goûts. Ce fut sa principale activité jusqu’en 1786.

Devenu en raison de sa réputation généalogiste de l’Ordre de Saint-Hubert de Bar et de plusieurs chapitres nobles de son pays d’origine, il se consacra à la généalogie dont il devint l’un des spécialistes.

A son retour à Paris en 1787, il publia ses  » Remarques sur la noblesse dédiées aux assemblées provinciales  » qui furent rééditées en 1788 avec un apparat critique et des études remarquables. C’est ce livre très documenté qui a retenu notre attention et a été reproduit.
Parallèlement, dans sa « lettre à Monsieur Chérin, sur son abrégé chronologique d’édits concernant la noblesse » il dévoilait sur la place publique son différend et sa rivalité avec Louis-Nicolas Hyacinthe Chérin, le généalogiste des ordres du Roi.

Malgré ces controverses, Antoine Maugard prévoyait de publier un « code de la noblesse », travail qu’il n’eut pas le temps d’achever, d’autant que la suppression des privilèges du 4 août 1789, puis de la noblesse le 19 juin 1790, entérinée par la constitution du 3 septembre 1791, ainsi que les bouleversements politiques ne lui permettaient plus d’en assurer la diffusion.

Il publia alors un journal qui n’eut qu’une brève existence, puis il s’intéressa à l’enseignement de la jeunesse. Le Mercure de France du 9 novembre 1793 reproduisit le discours sur l’instruction publique qu’il prononça à la barre de la Convention et qui lui permit, avec son activité pédagogique, d’être compté en 1795 au nombre des gens de lettres ayant droit aux « récompenses nationales ».

Parallèlement, Antoine Maugard étudiait les langues française et latine, tant du point de vue de la grammaire que de la littérature. Parurent ainsi un « discours sur l’utilité de la langue latine, contenant l’exposé de la méthode la plus simple et la plus prompte d’enseigner cette langue avec la française », des « remarques sur la grammaire latine de Lhomond », un « cours de langue française et latine » en 1808 et un « traité de la prosodie française de l’abbé d’Olivet » en 1812… En outre, zélé pédagogue, il forma gratuitement plusieurs élèves et souhaita ouvrir une école latine, ce qu’il n’obtint de l’université qu’ à la veille de sa mort, le 22 novembre 1817.

II – Antoine Maugard et Louis-Nicolas-Hyacinthe Chérin

Les relations entre Antoine Maugard et le généalogiste des Ordres du Roi commencèrent sous des auspices favorables. Remarqué par Bernard Chérin, père de Louis-Nicolas-Hyacinthe, Antoine Maugard travailla en tant que commis sous ses ordres, mais bientôt une brouille vint mettre fin à cette collaboration. L’origine en était, selon Chérin « un soulèvement de commis » ; il s’agissait, selon Antoine Maugard, d’intrigues liées à la succession de Bernard Chérin qui avait négligé de « prendre des précautions pour assurer la survivance de sa charge de généalogiste des ordres du Roi au profit de son fils » comme il le lui avait conseillé deux ans auparavant.
En effet, une dizaine de candidats pouvaient revendiquer cette charge et Louis-Nicolas-Hyacinthe n’avait que 23 ans lorsque son père s’éteignit le 21 mai 1785 ; or 25 ans était l’âge exigé. Grâce à l’entremise de l’archevêque de Bourges, chancelier des Ordres du Roi, et membre de la puissante famille des Phélypeaux, il fut, malgré l’avis du Baron de Breteuil, ministre de la maison du Roi, décidé que Berthier, le commis préféré de Bernard Chérin, assurerait l’intérim jusqu’à ce qu’en 1787 Louis-Nicolas-Hyacinthe ait atteint les 25 ans fatidiques.

Il n’est pas douteux que cet arrangement favorable à Louis-Nicolas-Hyacinthe Chérin ait suscité des critiques et des envieux, d’autant que le futur généalogiste des Ordres du Roi, s’il était intelligent, était également obstiné.

Doit-on ajouter qu’Antoine Maugard l’était autant et pouvait s’appuyer sur une expérience reconnue, puisqu’il avait été nommé généalogiste de l’Ordre de Saint-Hubert de Bar et de divers chapitres nobles, ce qui explique sans doute l’agressivité qui culmina lorsque Louis-Nicolas-Hyacinthe Chérin lui fit retirer cette charge pour l’attribuer au Cabinet des Ordres du Roi, c’est à dire en fait à lui, lors même que, par son attitude, il s’était aliéné Berthier qui prit sa retraite dès avril 1787.

Mais, au del à du heurt de ces deux personnalités, se profile le problème de la vérification des titres de la noblesse et de l’importance de la charge de généalogiste des Ordres du Roi.

III – Les généalogistes des Ordres du Roi

La charge de généalogiste des Ordres du Roi fut créée par Henri IV pour vérifier, à l’origine, la qualité des futurs chevaliers des Ordres du Saint-Esprit et de Saint-Michel. Son ressort s’étendit aux preuves de noblesse pour l’Ordre du Mont-Carmel et de Saint-Lazare, à celle du chapitre Saint Louis de Metz, puis à celles des Chevau-Légers de la garde du Roi, des sous-lieutenances, des cadets gentilshommes des colonies, des lieutenants des maréchaux de France, enfin à celle des honneurs de la cour. La charge, en partie concurrente, de Juge d’armes de France concernait, quant à elle, outre la vérification des armoiries, les preuves pour les pages, pour les écoles royales militaires et pour l’admission des demoiselles à Saint-Cyr et à l’Enfant-Jésus. Ces attributions, à l’exception des preuves pour les pages, étaient d’un moindre rapport financier pour les généalogistes.

Formé par les bénédictins de Saint-Maur,élève puis successeur admiré et compétent de Clairambault et de Beaujon, Bernard Chérin avait porté haut la renommée de sa charge et avait été anobli en 1774 par Louis XVI. Mais cette réussite cristallisait le mécontentement et l’envie. En outre, la perte de certains documents, la lenteur des dossiers, les décisions plus conciliantes du conseil des dépêches, compétent pour les confirmations ou reconnaissance de noblesse, enfin les idées de l’époque firent que l’on accepta avec de plus en plus de réticences qu’une seule personne décidât sans appel.

Se fit jour alors l’idée d’une commission ou d’un conseil, tribunal de la noblesse ou autre, pour assurer ce rôle.

Plusieurs projets de cette nature virent le jour, préconisant en outre de fusionner ou d’associer le cabinet du généalogiste des Ordres du Roi avec celui de juge d’armes.

Dans ses « Remarques sur la noblesse » Antoine Maugard accorde son suffrage à ces réformes, prônant un conseil inspiré d’institutions étrangères telles que les chambres héraldiques d’Angleterre et des Pays-Bas autrichiens, les chambres ou directoires de la noblesse du Saint-Empire, de la Suède ou de la Russie ; mais il voulait aussi restaurer l’autorité morale et supérieure du Roi d’armes qui devait être aux mains d’un gentilhomme…

La révolution qui entraîna la suppression du second Ordre en 1791 fit avorter tous ces projets.

IV – Les remarques sur la noblesse d’Antoine Maugard

Comme beaucoup de ses contemporains, Antoine Maugard pensait que le second ordre était en butte à deux problèmes cruciaux : l’usurpation de qualité et l’appauvrissement de ses membres.

a) L’usurpation de qualité

L’importance de l’usurpation de noblesse, au XVIIIe siècle, apparaît bien exagérées, quelque peu obsessive : Antoine Maugard partage l’opinion de ses contemporains comme de son rival L.N.H. Chérin. Celui-ciécrivait en 1788 dans son abrégé chronologique qu’il fallait « réprimer la licence effrénée des usurpations dont le progrès est non moins funeste à la noblesse, que préjudiciable au reste de la nation […] Combien n’est-il pas déplorable de voir que les effets en deviennent de jour en jour aussi pernicieux. Ils altèrent la pureté de la noblesse et en dégradent la possession aux yeux de ceux pour qui ses honneurs et ses prérogatives auraient été un juste motif d’émulation […] Le mal s’est accru avec une telle rapidité qu’il est de nos jours presque universel ». Il ajoutait « on voit aujourd’hui généralement dans tous les actes publics passés devant notaires, dans les actes de célébration de mariage, de baptême et de sépulture et jusque dans les tribunaux même, usurper avec audace et sans aucune espèce de retenue, des qualités nobles lorsqu’on n’est véritablement que roturier par la naissance… »

Antoine Maugard, quant à lui, va même jusqu’à avancer le nombre de 20.000 usurpateurs
Il semble qu’il s’agit l à plus d’une psychose que d’une réalité. En effet, au XVIIIe siècle, le perfectionnement de la monarchie administrative, les réformations de la noblesse entreprises par Louis XIV, l’action des intendants et des commissaires du Roi, mais aussi des tribunaux (Parlement, Chambres des comptes, Chambres des aides) y avaient mis les bornes et traquaient avec sévérité les abus. Localement, les contribuables, lors de la perception des impôts, cherchaient à restreindre le nombre des privilégiés et des exemptions fiscales pour diminuer la quote-part de chacun.

b) L’agrégation à la noblesse

L’usurpation, très réduite au XVIIIe siècle par rapport aux siècles antérieurs, pouvait paraître le coté négatif de l’agrégation à la noblesse. Cette agrégation avaitété officialisée par Saint Louis sous la dénomination de « tierce foi ». Ce n’était que la reconnaissance d’un usage assez général :étaient reconnus nobles les descendants d’un roturier acquéreur d’un fief, s’ils le conservaient pendant trois générations (acquéreur compris), prêtaient hommage et partageaient noblement ledit fief, c’est à dire d’une manière avantageuse pour l’aîné.

L’influence de la tierce foi se dessine aussi dans les déclarations de Louis XIV, en date du 8 décembre 1699, et de Louis XV, en date du 7 octobre 1717, qui admettaient comme preuve de noblesse, le port du qualificatif d’écuyer ou de chevalier pendant trois générations successives ou une possession centenaire sans contestation ou procès.

Au milieu du XVIIIe siècle, la création de ce qui fut dénommé la noblesse militaire par l’édit royal du 25 novembre 1750, spécifiant que trois générations successives d’officiers décorés de la croix de chevalier de Saint Louis conféraient la noblesse, est redevable d’un semblable état d’esprit.

c) L’anoblissement

L’opinion semble en fait, au XVIIIe, avoir associé dans une même réprobation usurpation et vente ou achat de lettres de noblesse, et amalgamer abusivement privilégiés et nobles. Curieusement, le premier abus présumé, celui de vendre des lettres de noblesse, paraît très restreint durant ce siècle ; seules à son début, les guerres coûteuses de la fin du règne de Louis XIV obligèrent la monarchie à utiliser cet expédient, encore que beaucoup de ces lettres eussent été annulées par la suite. Quant à l’achat de ces lettres de noblesse, il ne concerne tout au plus qu’un tiers des 3.000 charges (celles de conseillers- secrétaires du Roi en particulier… la savonnette à vilains pour les censeurs). Encore fallait-il, pour les plus favorables, 20 ans d’exercice ou… la mort en charge ! Et pour les autres, l’exercice successif de deux membres d’une même famille (père, puis fils) pour obtenir cette qualité. Antoine Maugard paraît d’ailleurs englober dans une semblable désapprobation  » l’achat  » et l’usurpation de noblesse comme entraînant une surcharge pécuniaire pour le peuple. Il conseille de diminuer  » le nombre des anoblis par charges pour augmenter celui des anoblis pour services rendus « , souhaitant qu’il n’y ait par année  » qu’environ 10 nobles par charges et 40 anoblis pour services rendus. Il en résulterait un très grand bien et il n’y aurait que 50 nouveaux nobles au lieu de 150  » … Ce faisant, il remettait en cause les hautes charges de judicature, les cours souveraines… et toutes les charges anoblissantes.

d) La noblesse et les privilèges

Plus crédible était la critique à l’égard de la profusion des privilégiés qui, à des titres divers, jouissaient d’exemptions fiscales.

Les privilégiés étaient aussi bien le soldat gradé non noble qui, en activité ou retiré après un nombre d’années variable selon son grade, échappait alors à la taille, que les détenteurs d’office de judicature ou autres, les habitants de certaines villes… et les commensaux, c’est à dire tout ceux qui étaient rattachés à la maison du Roi ; Cette dernière catégorie étant très extensible.étaient ainsi concernés les huissiers, fourriers, ciriers, valet chauffe-cire, porte-coffres, officiers suppôts servant dans la grande chancellerie… mais aussi éventuellement leurs veuves ; Tous étaient exempts de la taille, impôt roturier s’il en fut, mais aussi des aides et des gabelles.

Ainsi, lorsque L.N.H. Chérin écrit que sur la  » multitude innombrable de personnes qui composent l’ordre des privilégiés, à peine un vingtième peut-il prétendre véritablement à la noblesse immémoriale et d’ancienne race « , il est probable qu’il était bien en dessous de la vérité ; D’ailleurs, n’indique-t-il pas qu’en 1666 il n’avait recensé en Bretagne que 2084 familles nobles, en Languedoc 1627, en Touraine, Anjou et Maine 693, en Champagne 514 ; Ces chiffres sont plus que modestes.

e) Le problème de l’armorial de la noblesse

L’assimilation entre privilégiés et nobles était d’autant plus tentante qu’ à la différence d’autres pays il n’existait pas en France de tables généalogiques, et le catalogue général de la noblesse du royaume, prévu par les arrêts du Conseil en date du 15 mars 1669, du 2 juin 1670, des 10 avril et 12 juin 1683 et du 11 mai 1728… ne fut jamais réalisé par les généalogistes des Ordres du Roi. Quant aux juges d’armes de France, les d’Hozier, ils n’avaient pas été à même d’achever l’armorial de la noblesse prévu et décidé à la même époque. Ainsi, généalogistes des Ordres du Roi et juges d’armes de France prêtaient à la critique ; Et l’on comprend que certains aient voulu créer un organisme nouveau pour réaliser ce recensement à l’exemple d’Antoine Maugard. Ce dernier proposait en outre de mener une recherche de la noblesse française suivant l’exemple de réformation engagée par Louis XIV.

f) Complexité des preuves de noblesse en France

Il est probable que cette enquête aurait été longue, car pour éviter toute erreur, les conseils et généalogistes français, depuis Louis XIV, avaient posé avec rigueur les méthodes pour établir une filiation et les preuves de noblesse. Les principes en étaient qu’il fallait produire des titres originaux : aucune copie collationnée n’était admise et un acte original notarial ne pouvait être qu’une première grosse délivrée sur les minutes par celui qui les avait reçues. Seuls étaient valables les procès-verbaux de noblesse et autres reconnaissances ou décharges donnant la noblesse, ainsi que les expéditions délivrées par les greffiers et autres personnes publiques à ce préposées. La filiation pour les XVIe, XVIIe et XVIIe siècles devait être établie par trois actes ; deux seulement étaient nécessaires pour les siècles antérieurs, avec des qualifications que seule la noblesse pouvait porter ; Et nulle part, sauf dans les colonies, n’étaient acceptés les actes de notoriété. Encore devaient-ils être établis par les conseils supérieurs, et non par les gentilshommes du ressort comme cela se pratiquait en Irlande, écosse, Angleterre, Pologne et dans l’Empire. La complexité et la rigueur des preuves  » à la française  » avaient probablement été la cause de l’échec de tout  » inventaire de la noblesse « .
Cette rigueur et l’absence de recensement général du second ordre avaient deux conséquences : la croyance à une noblesse pléthorique et à des usurpations innombrables, et à la difficulté pour une noblesse souvent ancienne, mais pauvre, de faire ses preuves, alors que la monarchie et les esprits éclairés cherchaient à l’aider en créant des institutions éducatives . Bien plus, au XVIIIe, malgré les anoblissements, le nombre des familles du second ordre semble avoir décru. Selon les études les plus récentes, on dénombrait 135.000 personnes pour 27.000 foyers, chiffres déjà avancés par Taine, alors que Chérin dénombrait 17.000 familles, ce qui correspondait à 340.000 individus ; d’Hozier, quant à lui, estimait ce chiffre à  » 146.000 maisons nobles (foyers) comprenant 436.000 têtes « . Le pourcentage raisonnable par rapport à l’ensemble de la population se situerait entre 1 et 1,3%. Doit-on ajouter que grands étaient les clivages à l’intérieur de l’Ordre ; déj à à la fin du XVIIe siècle, selon les registres de la première levée de capitation, ses représentants sont situés dans 22 classes sur 24 et taxés de 6 à 1500 livres… un rapport de 1 à 250 !

g) La noblesse et les institutions d’aide

Pour bénéficier de ces institutions, tels le collège des 4 nations fondé par Mazarin…, Saint-Cyr par Louis XIV et madame de Maintenon…, les écoles royales militaires par Louis XV…, il fallait faire ses preuves. Ainsi, les demoiselles capables d’entrer à Saint-Cyr devaient fournir, à partir de 1736, un extrait baptistaire légalisé, une attestation justifiant le peu de fortune de leur famille signée par l’évêque du lieu, la première grosse du contrat de mariage de leurs parents (ou une expédition délivrée par le notaire et certifiée par le juge du lieu), les justifications de 140 ans de noblesse sans anoblissement ni dérogeance. Après le 1er juin 1763, il fallut en outre, l’attestation de service de dix années au moins dans les armées royales de leur père ou de leur aïeul.

La multiplicité des pièces impliquait démarches et recherches, et par l à des dépenses élevées que la maison royale de Saint-Cyr ne remboursait à la famille que lorsque la demoiselle était admise. Les preuves pour la maison de l’Enfant-Jésus étaient les mêmes que pour les 250 jeunes filles de Saint-Cyr, mais au lieu de 150 années de noblesse il en fallait 200 !
Les jeunes gentilshommes, quant à eux, étaient concernés par les écoles royales militaires. Pour être l’un des 500 heureux bénéficiaires, il fallait prouver quatre degrés de noblesse paternelle (le candidat inclus),énoncés sur titres originaux pour chacun des degrés de la filiation. Cependant, pour ces écoles, le Roi prenait à sa charge les frais de preuve de noblesse car selon la déclaration de Louis XV du 22 janvier 1752 : « Après l’expérience que notre prédécesseur et nous-même avons faite de ce que peuvent sur la noblesse française les seuls principes de l’honneur, que n’en devrions-nous pas attendre si tous ceux qui la composent y joignaient les lumières acquises par une heureuse éducation » ; Pour se faire, sans augmenter les charges du reste de la population,  » nous avons résolu de fonder une école royale militaire et d’y faire élever sous nos yeux 500 jeunes gentilshommes nés sans biens, dans le choix desquels nous préférerons ceux qui, en perdant leur père à la guerre, sont devenus les enfants de l’état « . Mais, comme l’écrit Maugard,  » le gentilhomme pauvre garde ses enfants chez lui parce qu’il n’a pas les moyens de les placer : où trouvera-t-il de quoi fournir à la dépense qu’il sera obligé de faire pour rassembler les titres dont il aura besoin, si on le force à prouver sa noblesse, pour continuer à jouir de ses privilèges ? « . Il s’agissait notamment de privilèges fiscaux comme l’exemption de la taille, alors que les traitants et collecteurs étaient sans pitié pour les gentilshommes besogneux, surtout s’ils étaient démunis de relations et de documents. Aussi Antoine Maugard préconisait-il une caisse d’entraide de la noblesse pour compléter l’action menée par les institutions récemment créées, comme celle de Mirecourt due aux soins de Madame Adélaïde. Mais la condition de gentilhomme était devenue d’autant plus difficile que les impôts établis depuis le début du XVIIIe, tels les vingtièmes et la capitation, ne les épargnaient pas, contrairement à ce que l’opinion voulait faire croire, n’envisageant en cela que la taille.

De surcroît, d’autres établissements leur étaient inaccessibles faute de moyens et, pour les hobereaux démunis, les places de pages de la Grande ou de la Petite écurie étaient à plus forte raison hors de portée ; Outre remonter les preuves à 1550 en fournissant des titres en original, il fallait assurer à leur progéniture une pension évaluée à 830 livres en 1733. Quant aux pages de la Chambre avec le versement obligatoire de 200 livres pour le certificat de noblesse et la généalogie dressée par les d’Hozier, leur entretien et leur pension très coûteuse faisaient que leur placeétaient réservées à la noblesse ancienne très aisée.

Il en était de même pour certains ordres de chevalerie comme l’ordre de Saint-Lazare, tant par le nombre de degrés de noblesse paternelle à prouver – il passa d’ailleurs de 4 à 9 du début à la fin du XVIIIe siècle – que pour les droits à payer. Ainsiéchouera le projet de créer des commanderies pour pensionner les gentilshommes blessés ou en fin de carrière militaire. Quant à l’ordre joint de Notre-Dame-du-Mont-Carmel, quatre degrés seulement restèrent nécessaires, mais seuls quelques élèves de l’école royale militaire purent, suivant leur mérite personnel, l’obtenir avec une petite pension… En fait, ces deux ordres unis étaient devenus des décorations.

h) Hiérarchie dans le second ordre

Antoine Maugard consacre une très intéressante part de son ouvrage aux divers types de noblesse et différencie les membres du second ordre suivant divers critères. Dans sa préface, il préconise un classement selon l’ancienneté de la noblesse de chaque famille, ou plus exactement selon le nombre de générations, car,écrit-il, « quand pour être admis dans la première classe, il ne faudra que prouver un certain nombre de degrés sans remonter à une époque fixée, il n’y aura pas d’entraves, personne n’en sera exclu ; le nouvel anobli saura qu’ à la dixième, douzième, fut-ce vingtième génération, ses descendants y seront reçus ; cette espérance, cette certitude sera d’avance sa félicité ». Cette dernière assertion est cependant contraire à la plupart des preuves exigées en France, à l’exception des ordres militaires et religieux. Celles-ci imposaient de remonter à une date fixe (Honneurs de la cour, pages, écoles royales militaires…). D’autre part, Antoine Maugard souhaite que l’on crée un clivage entre les principales maisons nobles de province et la noblesse ordinaire, entre la noblesse d’ancienne extraction et les nouveaux nobles. Cette dernière idée correspond à la thèse et à la jurisprudence nobiliaire qui admettaient aussi en certaines régions qu’en cas de dérogeance la qualité de gentilhomme d’extraction était, à la différence de l’anobli, imprescriptible. Mais Maugard pense qu’il faudrait aussi introduire la notion de type de noblesse. Il semble l à avoir été inspiré par le règlement de l’impératrice de Russie en date du 29 avril 1785, divisant en 6 catégories la noblesse suivant son ancienneté, son origine – administration ou armée – ou pays étrangers.

i) Titres de noblesse

Quant aux problèmes et à la valeur des titres dont l’importance est limitée en France par rapport à d’autres contrées comme l’Empire, l’Espagne ou le Royaume-Uni, Antoine Maugard s’y intéresse au point de placer au même rang l’usurpation de titres par des gentilshommes et celle de la noblesse par les roturiers. Il suggère :  » en recherchant les usurpateurs de noblesse, il conviendrait de rechercher aussi les usurpateurs de titres de chevalier, comte, marquis, etc… Il n’est pas plus permis à un noble d’usurper un titre qu’à un roturier d’usurper la noblesse  » ; ce qui est contraire à la pratique en France. Car s’il est certain qu’il exista des règlements dans ce sens, l’application en fut toujours négligée à l’égard des gentilshommes, sauf pour le titre de duc.

Plus intéressante est son estimation du nombre de titres de marquis, comte, baron à 8.000 dont 2.000 seulement le sont légalement, 4.000 dignes de l’être, 2.000 faux ; il en est de même de sa proposition de régulariser ces titres  » dignes de l’être  » moyennant finances : 1.500 livres pour les titres de marquis et comte, 1.000 livres pour ceux de vicomte et de baron.
Son rival L.N.H. Chérin partage curieusement ce sentiment quand il énonce  » l’usurpation des titres de noblesse par les roturiers et des titres de haute noblesse par celle qui est inférieure  » est  » un danger pour le Second Ordre  » avec  » la manie de quitter la province « .

j) Assemblées provinciales et fiscalité

Ces  » Remarques sur la noblesse adressées aux assemblées provinciales  » portent la marque de cette seconde moitié du XVIIIe siècle où ressurgissent les particularismes et où s’affirment les élites locales alors que naît une opinion publique versatile, donc portée à tous les engouements.

Dès Louis XV et les projets de Laverdy, la monarchie française y fut sensible. Ainsi, de 1764 à 1789, peut-on noter la continuité entre les initiatives successives, les plans de Turgot et de Dupont de Nemours, jusqu’au réformes de Calonne.

Pour faire appliquer celles-ci, Louis XVI, par un édit en date du 22 juin 1787, créa des assemblées décentralisées à trois niveaux : le plus élevé était celui de la province, puis à des degrés inférieurs celui des élections et enfin celui des paroisses ou des villes. Le projet de Calonne, dévoilé la même année à l’assemblée des notables, prévoyait des représentants des trois ordres et tenait compte, pour les électeurs, du cens c’est à dire des impôts payés. Les assemblées provinciales étaient, pour une part fixe, nommées par le Roi et pour l’autre, élues. Pendant leur intersession, un bureau et un procureur-syndic devaient siéger ; leurs attributions portaient sur tous les anciens impôts, notamment sur leur répartition. En outre, ces assemblées avaient le pouvoir d’adresser des doléances au souverain.

Cette vaste réforme de 1787 devait s’étendre à tous le royaume et permettre d’assurer des interlocuteurs au gouvernement, de donner des pouvoirs accrus aux élites locales… et à plus long terme, de réformer le système fiscal du pays et d’assainir le trésor obéré par la dette et les emprunts consécutifs à la guerre d’Amérique. Le volet financier, dirons-nous, n’était absent d’aucune de ces réformes ; il affleure d’ailleurs sans cesse sous la plume des réformateurs et des écrivains, comme sous celle d’Antoine Maugard dans ce livre.

Les assemblées créées en 1787, faute de temps et en raison des problèmes budgétaires de la Monarchie, ne purent s’affirmer ; Leur échec, comme celui de l’assemblée des notables réunie la même année par Louis XVI, entraîna la réunion des États généraux, la fermentation des esprits, les intrigues, la Révolution.

La confusion alors était grande ; ainsi un contemporain, membre du second ordre mais élu par le tiers aux États généraux, prononça-t-il en substance ces paroles prosaïques mais profondes :  » les hommes, c’est comme les poissons, ils pourrissent par la tête…  » : il s’agissait de Mirabeau qui ne fut pas pour rien dans le déclenchement fatal et tragique des passions.

V – Le second ordre à la fin de l’ancien régime selon le généalogiste Antoine Maugard

ce livre rend compte à la fois de l’expérience d’un savant généalogiste, mais aussi d’un esprit sensible aux controverses et aux engouements de son époque à la veille de la révolution de 1789. Aussi, complète-t-il également notre information par des analyses très documentées sur la dignité de chevalier et la valeur du titre d’écuyer. Il nous dévoile les projets de réforme du second ordre dans l’optique du siècle des lumières foisonnant d’utopies. Doit-on ajouter qu’Antoine Maugard semble sur ce point avoir été plus prudent et réservé, moins dupe de son époque que son rival Chérin. Celui-ci ne déclarait-il pas dans le préambule de son abrégé chronologique :  » Dans l’ordre de la nature, les hommes naissent égaux et libres. L’esclavage, né de la force, ne put former d’abord une inégalité réelle dans l’espèce humaine, par la raison que ce pouvoir n’étant point alors légitimé par une convention sociale, était nécessairement nul et périssable par les changements divers que devait éprouver la cause qui l’avait fait naître. Ce ne fut que lorsque, dans le progrès des choses, le droit positif succéda à la violence, que l’établissement des lois et de la propriété fixa pour toujours l’inégalité des conditions  » mais ajoutait-il,  » La noblesse est une distinction d’État nécessaire à la condition du royaume. Elle en est la force, elle en est le soutien, elle est comme l’essence de la monarchie française. La maxime fondamentale d’une monarchie, dit Montesquieu, est celle-ci : point de monarque, point de noblesse, point de noblesse, point de monarque, mais on a un despote.  »

L’année 1788 allait s’achever, Antoine Maugard allait devenir pédagogue, Louis-Nicolas-Hyacinthe Chérin, général, et le despotisme serait autre que monarchique…

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LES JULOD(S) OU JULODED EN BRETAGNE

LES JULODED : GRANDEUR ET DÉCADENCE D'UNE CASTE PAYSANNE EN BASSE-BRETAGNE

LES JULODED

Extrait des actes du congrès de Crozon-Morgat 1996, SHAB,
par Michel Lahellec

LES JULOD(s) ou JULODED en Bretagne

Jusqu’à ces dernières années, le terme « julot » – selon la graphie usuelle que nous suivrons ici – n’était guère connu en dehors du Léon et du pays de Daoulas avant que quelques universitaires s’y intéressent. L’usage en est malaisé, car son sens varie avec celui qui l’emploie. Précisons donc que dans ces quelques lignes nous ne l’appliquerons qu’à ceux qui, au siècle dernier et jusqu’à la fin de la première guerre mondiale, se le donnaient à eux même sans pouvoir vraiment le définir, et qui formaient une vieille société traditionnelle, une sorte d’aristocratie rurale. L’enquête est devenue depuis longtemps presque impossible. Commençons donc par une brève description suivant la tradition que l’on pouvait encore recueillir il y a une bonne quarantaine d’années.

Ce groupe rural localisé dans le Léon méridional est aussi difficile à cerner que la noblesse grecque de l’antiquité, ou encore celle du haut moyen-âge, et plus encore à vrai dire, car l’étude en repose presque uniquement sur une tradition, plus vécue qu’explicitée, et sur l’observation ancienne ; car ce qui pouvait paraître insolite à un « étranger » représentait, tout au moins pour les plus anciens, le monde naturel et normal, une donnée de fait. En s’inspirant d’une expression de Louis Gernet sur la noblesse grecque antique, on peut dire qu’il s’agissait de « participation héréditaire à une singularité traditionnelle ». C’était une « question de naissance et de mode de vie » (expression d’Oswyn Murray). Ce groupe social était originaire du sud du Haut-Léon, région proche des monts d’Arrée, et ne s’est étendu que tardivement vers le nord ; sa topographie excluait même Landivisiau jusqu’au siècle dernier, et, bien entendu, le pays de Lesneven, et plus encore celui de Plouvorn. Encore aujourd’hui et comme l’écrivait P. Loaëc en 1981 : « Dans le pays de Lesneven (…) le terme julot est certes connu, mais nul paysan, si riche ou important qu’il soit, n’aurait l’idée de dire qu’il est un julot ».

Cette « aristocratie paysanne » comme on l’a appelée (nous avons recueilli deux fois l’expression populaire « demi-noble ») était limitée à quelques familles de propriétaires ruraux, qui tiraient leur aisance « initiale » de la fabrication et surtout du commerce de la toile ; c’était là en fait l’origine indiscutable de toute richesse dans cette région, et la relation étroite des julots au commerce toilier ne doit pas faire admettre trop hâtivement une équivalence, car nombreux étaient les marchands toiliers qui n’étaient pas julots. Ce groupe avait ses références propres, ses membres montraient une solidarité particulière entre eux ; ils avaient conscience de former par rapport au reste du milieu rural, et aussi aux « étrangers » voisins, un groupe cohérent, et en tiraient spontanément fierté. C’était indiscutablement un vrai « groupe ethnique » au sens technique du terme, avec les frontières qui le constituaient et en assuraient la permanence et la reproduction, et bien entendu, les passages frontaliers inhérents à la vie (cf les travaux de Frederik Barth et de son école).

C’est ici qu’intervient un des aspects majeurs du problème : le caractère héréditaire ; car on naissait julot, il n’était pas possible de le devenir. Ceci était lié à la notion même de famille : la famille était la seule réalité sociale du groupe et celui-ci formait une gens, une sorte de cousinage où les cognats, membres de la famille maternelle, avaient la même importance que les agnats. Mais les plus importantes de ces familles, dont l’alliance était la plus flatteuse et la plus recherchée, formaient des « noyaux de tradition » au sens que Herwig Wolfram donne à ce terme. Tout ceci implique, notons le, que d’autres familles, généralement de condition assez comparable, pouvaient s’y agréger par des mariages, la transmission de la qualité de julot n’excluant pas la ligne féminine ; il s’agissait encore une fois de « naissance et de mode de vie ».

L’importance de la généalogie – et des généalogies – est donc incontournable. Les julots connaissaient souvent leur parenté jusqu’au dixième degré et nous avons pu relever des traditions généalogiques orales remontant au XVIIe siècle. Mais le risque est grand. Il est normal en effet dans une perspective synchroniste, de définir un groupe davantage par ses alliances que par ses ascendances car « c’est la série des mariages réalisés qui est à la base des généalogies des personnes étudiées » (Enric Porqueres i Gené), mais on devine tous les pièges d’une méthode généalogique qui prétendrait retrouver les frontières d’un groupe à partir des ascendants de ses constituants actuels, car « ces généalogies sont redéfinies à chaque nouveau mariage réalisé » ; ce ne serait possible que s’il s’agissait d’un milieu fermé, strictement endogame, d’une caste.

C’est donc en fait à partir de la tradition et de l’observation ancienne, ce sont elles seules qui le permettent, qu’on peut interpréter les archives familiales des XVIIe et XVIIIe siècles, constituées essentiellement d’actes notariés. Les caractères du groupe julot apparaissent dans son histoire telle qu’on peut la reconstituer à partir du XVIIe siècle débutant ; son immobilisme apparent est en fait une erreur de perspective. Il s’agissait vraisemblablement (on peut tout au moins le supposer) d’une résurgence plus encore que d’une survivance, à partir du noyau assez restreint qui déploya, à considérer les faits de l’extérieur, une véritable stratégie de pouvoir. Dès le XVIIe siècle, il s’étend grâce à des alliances avec les enfants ou petits-enfants des nouveaux domaniers du Léon méridional. (C’est en effet au début de ce siècle que ce régime foncier, jusque là très peu répandu, prit son essor) pratiquant ainsi une large exogamie. On relève en particulier au XVIIIe siècle un certain nombre de mariages avec de riches penherezed.

A la fin du XVIIIe siècle et au début du siècle suivant, l’essor se poursuit, vers Landivisiau (précédemment en dehors du territoire, c’est ainsi que Guy Le Guen de Kerangall n’était pas julot) puis vers Lesneven. Ces alliances avec de nouvelles familles, de même niveau économique et social mais d’origine différente, étendent le territoire géographique initial, car elles sont incorporées, englobées ; elles s’intègrent à la vie du groupe, en adoptent la mentalité et deviennent même peut-être plus « julotte » que les julots plus anciens, comme en Irlande les anglo-normands devenus « hibernis hiberniores » ! Elles en gardent les références et le caractère rural mais, paradoxalement, elles tendent à fermer le groupe par un comportement plus endogamique, dû peut-être à une importance plus grande du lignage autant qu’à des facteurs plus contingents, événementiels et économiques.

Ce texte sert d’introduction à une critique de l’ouvrage de Louis Elegouet : « Les Juloded, grandeur et décadence d’une caste paysanne en Basse-Bretagne », qui néglige les données socio-historiques connues essentiellement par la tradition, et fait un usage personnel et modernisant du terme « Julot ».

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LES PREUVES DE NOBLESSE SOUS L’ANCIEN RÉGIME

Des différentes preuves de noblesse qui se font en France, avec l’indication des époques où elles doivent être remontées, ou du nombre des degrés ou quartiers qui les composent.

  • Ordres de chevalerie et confréries nobles.
    Ordre du Saint-Esprit, 4 degrés.
    – de Saint-Michel, 3 degrés.
    – de Saint-Lazare, 9 degrés sans principe connu.
    – de Notre-Dame du Mont-Carmel, 4 degrés.
    – de Malte, 8 quartiers du côté paternel, et 8 du côté maternel.
    – Confrérie de Saint-Georges en Franche-Comté, 16 quartiers.
    – de Saint-Hubert de Bar, 5 degrés non compris le présenté.
  • Honneurs de la cour, ou présentations, à l’an 1400, sans anoblissement connu.
  • Maison du roi. Sous-lieutenants des gardes du corps, à l’an 1400, sans anoblissement connu.
    Gardes du corps, preuve de naissance noble.
    Pages de la grande écurie, à 1550, sans anoblissement connu.
    Écuyers, 200 ans.
  • Maison de la reine : Pages et écuyers, 200 ans.
  • Maison de Monsieur : Pages et écuyers, 200 ans.
  • Maison de Mgr comte d’Artois : Pages de la chambre et écuyers, 200 ans.
  • Maison de Mgr le duc d’Orléans : Pages et écuyers, à 1550, sans anoblissement connu.
  • Maison de Mgr le prince de Condé : Pages et écuyers, à 1550, sans anoblissement connu.
  • Maison de Mgr le prince de Conti : Pages et écuyers.
  • Maison de Mgr le duc de Penthièvre : Pages et écuyers.
  • Emplois militaires. Troupes réglées, 4 degrés.
    Élèves de la marine, 4 degrés.
    Troupes des colonies, 3 degrés.
    Sous-lieutenants du régiment des gardes-françaises, 5 degrés.
    Lieutenants des maréchaux de France, 4 degrés.
  • Maisons d’éducation d’hommes et de femmes. Écoles royales militaires, 4 degrés.
    Collège royal de la Flèche, 4 degrés.
    Collège de Rennes, 4 degrés.
    Collège Mazarin, 4 degrés.
    Séminaire de Joyeuse, 4 degrés.
    Maison royale de Saint-Cyr, 140 ans.
    Maison royale de l’Enfant-Jésus, 200 ans.
    Maison de demoiselles de Rennes, 5 degrés paternels.
  • Chapitres nobles d’hommes. Chapitre de Saint-Jean de Lyon, 8 degrés, 4 paternels, 4 maternels, la ligne paternelle remontant à 1400 sans anoblissement connu.
  • Chapitres nobles de femmes. Chapitre de Bourbourg, à 1400, sans anoblissement connu, et 3 degrés maternels.
    – de Bouxières-aux-Dames, à 1400, sans anoblissement connu, et 8 degrés maternels.
    – de Coyse en l’Argentière, 9 degrés paternels et 4 maternels.
    – de Laveine, 1400, sans anoblissement connu, et 3 degrés maternels.
    – de Lons-le Saunier, 9 degrés paternels et 4 maternels.
    – de Maubeuge, 8 quartiers paternels et 8 maternels.
    – de Poulangy, 10 degrés paternels et 4 maternels.
    – de Saint-Louis de Metz, à 1400, sans anoblissement connu, et 3 degrés maternels.
  • Chapitres nobles d’hommes. Chapitre d’Ainai, 100 ans de noblesse paternelle.
    – d’Aix, preuve de naissance noble.
    – d’Amboise, preuve d’ancienne noblesse.
    – de Beaumes-les-Messieurs, 16 quartiers, 8 paternels et 8 maternels.
    – de Besançon, 16 quartiers, 8 paternels et 8 maternels.
    – de Brioude, 16 quartiers, 8 paternels et 8 maternels.
    – de Gigny, 4 quartiers sans les alliances du côté paternel et 4 du côté maternel avec les alliances.
    – de Lescar, preuve de naissance noble.
    – de Lure et de Murback, 16 quartiers, 8 paternels et 8 maternels.
    – de Metz, 3 degrés.
    – de Nancy, 4 degrés.
    – de Saint-Claude, 16 quartiers, 8 du côté paternel et 8 du côté maternel.
    – de Saint-Diez, 3 degrés.
    – de Saint-Maxe de Bar, 3 degrés.
    – de Saint-Pierre de Mâcon, 4 degrés, tant paternels que maternels.
    – de Saint-Pierre de Vienne, 9 degrés du côté paternel et du côté maternel.
    – de Saint-Victor de Marseille, 150 ans.
    – de Savigny, 4 degrés.
    – de Strasbourg, 8 degrés de haute noblesse.
    – de Toul, 3 degrés.
  • Chapitres nobles de femmes. Chapitre d’Alix, 8 degrés paternels sans anoblissement et 3 degrés maternels.
    Chapitre d’Andlaw, 16 quartiers, 8 paternels et 8 maternels.
    – d’Avesnes, idem.
    – de Beaume-les-Dames, idem.
    – de Blesse, 4 degrés.
    – de Château-Châlons, 16 quartiers, 8 paternels et 8 maternels.
    – de Denain, 16 quartiers de noblesse ancienne et militaire.
    – d’Épinal, 200 ans de noblesse, chevaleresque des deux côtés.
    – d’Estrun, 8 quartiers, 4 paternels et 4 maternels.
    – de Leigneux, 5 degrés.
    – de Loutre, preuve de naissance noble.
    – de Migette, 16 quartiers, 8 paternels et 8 maternels.
    Chapitre de Montfleury, 4 degrés.
    – de Montigny, 8 quartiers paternels et 4 maternels.
    – de Neuville, 9 degrés.
    – de Poussay, 16 quartiers, 8 paternels et 8 maternels.
    – de Remiremont, 200 ans.
    – du Ronceray, 8 quartiers, 4 paternels et 4 maternels.
    – de Saint-Martin de Salles, 8 degrés.
  • États des Provinces. États de la Province d’Artois, 100 ans.
    – de la Province de Bretagne, 100 ans.
    – de la Province de Bourgogne, 100 ans.
    – de la Province de Languedoc.
    Les Barons, à l’an 1400.
    Et les envoyés des barons, 6 degrés.
    – du pays de Provence, 100 ans, 3 degrés.
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ÉCUYER : UNE QUALIFICATION NOBILIAIRE PEU CONNUE

DES QUALIFICATIONS NOBILIAIRES

Une qualification caractéristique de la noblesse :

Il ne fait aucun doute qu’il nous faille remonter aux temps les plus anciens de la chevalerie pour retrouver l’origine du nom d’écuyer.
La Roque estime que l’étymologie de ce mot
« vient de ce que les nobles ont toujours porté les écus et les armoiries, qui sont les plus visibles marques de la noblesse. »

Mais il pense aussi qu’il puisse venir d’écurie,
« parce que les écuyers avaient soin des chevaux qui appartenaient aux chevaliers ».

La plupart des auteurs, cependant, s’accordent plus volontiers sur le premier sens, et mentionnent l’étymologie d’écuyer comme étant « scutifer » ou « scutarius » : porteur de l’écu.
Claude Fauchet rapporte que sur d’anciennes chartes latines le Grand Écuyer de France est nommé scutifer parce qu’il porte l’écu du roi.
D’ailleurs La Roque ne continue-t-il pas en rappelant que :
« L’écu, ou bouclier, était si considéré qu’on punissait ceux qui l’abandonnaient, et non pas ceux qui quittaient la lance, parce que l’écu servait comme de rempart et de défense dans l’armée. »

A l’époque féodale donc, l’écuyer, jeune noble effectuant son apprentissage auprès du chevalier, l’accompagnait dans les joutes, lui servait de second et avait la garde de son écu blasonné, de sa devise et de ses symboles.
Puis, peu à peu, le terme d’écuyer allait prendre une importance et une signification telles que tous les gentilshommes, même parmi les plus importants, en revendiqueront bientôt la qualité.

« C’était le temps ou la chevalerie étant particulièrement à l’honneur, personne n’imaginait de dignité plus relevée que celle qu’elle conférait. » écrit le vicomte de Marsay qui cite M. de Ludre, rappelant qu’avant 1500 : « Les plus grands seigneurs s’intitulaient tantôt écuyers, tantôt chevaliers, et que les princes de sang royal eux-mêmes ne rougissaient pas de la qualification d’écuyer. ».

En même temps qu’au déclin de la chevalerie, on assiste au plein essor de la noblesse, et la condition d’écuyer va perdre rapidement son prestige. Elle ne le retrouvera que lors de la seconde moitié du XVIe siècle, époque à laquelle les qualités d’écuyer et de noble vont se voir de nouveau rattachées l’une à l’autre.
Déjà le 30 septembre 1554, un arrêt du parlement considéra la qualification d’écuyer comme caractéristique de l’état nobiliaire. Puis l’ordonnance des États de Blois, en mai 1579, ratifiera indubitablement la mutuelle dépendance de ces deux qualités.
Art 257 : « S.M. veut que l’ordonnance faite sur la remontrances des États tenus à Orléans soit gardée contre ceux qui usurperaient faussement et contre vérité le titre de Noble, prendraient le nom d’Écuyer et porteraient des armoiries timbrées, ordonnant qu’ils soient muletés d’amendes arbitraires. »

Cette ordonnance fut confirmée par un édit du roi en mars 1583.
Outre cette dépendance « Ecuyer-Noble », la qualification d’écuyer fut de surcroît subordonnée à la seule noblesse héréditaire, excluant de ses rangs la noblesse acquise dans les fonctions civiles.
L’article 25 de l’édit de mars 1600 l’atteste :
« …S.M. défend à toutes personnes de prendre le titre d’écuyer, de s’insérer au corps de la noblesse s’ils ne sont issus d’un aïeul et père qui ayent fait profession des armes ou servi au Public en quelques charges honorables… »

L’atteste également l’article II de l’édit de janvier 1634, contenant le règlement sur les tailles :
« Défendons à tous nos sujets d’usurper le titre de noblesse, prendre la qualité d’écuyer et porter armoiries timbrées, à peine de 2.000 livres d’amende, s’ils ne sont de maison et extraction noble. »

Dès la seconde moitié du XVIIe siècle, par le développement important de la noblesse, la qualification d’écuyer se répandit, « se vulgarisa étrangement ».
Perdant sa signification première, la qualification d’écuyer venait à exprimer tout simplement la noblesse à celui qui la portait.
« Le fils du plus modeste secrétaire du Roi ou du plus petit officier municipal, écrit le vicomte de Marsay, eut désormais autant de droit à cette appellation que les descendants des races chevaleresques. »

Parmi les nombreuses charges et emplois conférant la qualité d’écuyer, citons de façon non exhaustive, les gardes du corps du roi et de la reine, les gardes du château, les gendarmes et les chevau-légers, les prévosts-généraux provinciaux et particuliers, vice-baillis et vice-sénéchaux et lieutenants criminels de robe-courte, leurs lieutenants, assesseurs, les procureurs du roi …

La liste est longue, même si l’octroi de la qualité d’écuyer ne vaut pour la plupart que tant que l’individu est revêtu de sa charge seulement.
Rappelons par exemple, l’arrêt du Conseil du 24 mars 1699 qui permet aux porte-manteaux et aux huissiers de la chambre et du cabinet du roi, de prendre la qualité d’écuyer
« tant qu’ils seront revêtus de leurs charges, ou qu’ils en auront obtenu des lettres de vétérance après vingt-cinq ans de service, sans qu’ils puissent prendre cette qualité, s’ils se démettent desdites charges avant ledit temps, et sans qu’en aucun cas, ladite qualité d’écuyer puisse passer à leurs descendants. »

Au-delà de toutes considérations, les qualifications d’écuyer étaient devenues, c’est certain, propriété de la noblesse, elles en constituaient le témoignage.
En outre, par l’adjonction de certaines mentions, les qualifications d’écuyer étaient censées indiquer l’ancienneté de la noblesse.

Jean Meyer explique qu’en Bretagne, une différence très nette existait entre l’écuyer de « simple extraction » et celui « d’ancienne extraction ».
« Le premier, écrit-il, a prouvé trois partages nobles successifs, soit, en gros, un siècle d’ancienneté. […] Un écuyer d’ancienne extraction prétend à une origine plus ancienne – au moins au XVe siècle … »

L’auteur continue en précisant que la mention « d’extraction » n’excluait néanmoins pas que la noblesse n’ait pu être remontée plus haut, mais seulement que le possesseur n’avait pu apporter de preuves plus anciennes.

Cela dit, devant l’importance de la signification des qualificatifs, l’on comprend parfaitement que ce fut principalement sur eux que se reposèrent, en établissant une filiation, les généalogistes lors de leurs enquêtes et de leurs recherches sur les faux nobles, tant lors de la grande Réformation de 1668-1672, que lors de celles qui suivirent.

« Quelle confiance […] peut-on prendre […] dans une preuve de noblesse qu’une famille […] tenterait d’établir depuis l’année 1688, lorsqu’on sait qu’en 1696, c’est à dire huit ans après, les usurpations s’étaient multipliées à un tel point que Louis XIV, pour en réprimer le progrès, fut contraint de faire procéder de nouveau à la recherche des faux nobles qui, ayant été commencée en 1666, avait été suspendue en 1674 à cause des guerres. » écrit Chérin.

Ainsi, pour prouver sa noblesse dans la plupart des États du royaume, explique ce généalogiste, il est nécessaire de produire, sur chaque degré, des titres qui établissent la filiation et dans lesquels les sujets soient qualifiés de nobles, écuyers, chevaliers etc.

Une exception cependant en Bretagne, où il était exigé la production d’au moins trois partages nobles successifs.
« Ce second moyen, écrit toujours Chérin, est particulier à la province de Bretagne. […] Il est d’autant mieux fondé […] qu’anciennement la noblesse n’y prenait souvent aucune qualité dans les titres, et qu’il ne lui restait d’autres preuves de son état que les partages nobles. »
Jean Meyer nie fermement d’ailleurs, cette dernière constatation.

A la fin de l’ancien Régime, la qualification d’écuyer perdit de son importance et de sa signification. En effet, l’état s’étant constitué une source de revenu non négligeable grâce aux nombreux anoblissements concédés et s’attachant de moins en moins à l’intégrité de la noblesse, « commença à pratiquer une tolérance qui devint bientôt de la complaisance. »

Marcel Marion rapporte que le vicomte de Toustain, dans un mémoire sur les corvées présenté aux États de Bretagne en 1776
« pensait que des amendes sévères sur ceux qui depuis vingt ans avaient usurpé le port d’armes et la qualité d’écuyer formeraient un appoint considérable à la confection et entretien des routes. ».

On se désintéressa peu à peu des usurpations des qualifications d’écuyers dans la vie courante, aussi voit-on nombre de bourgeois les usurper dans les actes notariés et même dans ceux de l’état civil, écrit le vicomte de Marsay.

Omission de qualification :

L’omission de la qualité d’écuyer, pendant cent ans, fait-elle perdre la noblesse dans tous les cas ? Des lettres de relief, ou des lettres de nouvel anoblissement sont-elles nécessaires ? Antoine Maugard se prononce dans son ouvrage en indiquant un certain nombre d’éléments ; non sans avoir rappelé en premier lieu qu’en France aucune loi ne s’explique clairement sur cette question.

Une loi spécifique aux colonies :
« Il existe, il est vrai, dit Maugard, des lettres patentes, en forme d’édit, concernant les anoblissements dans les colonies françaises & les preuves de noblesse à faire dans le royaume par les habitants des colonies ; données à Versailles le 24 Août 1782 ; registrées à la cour des aides le 18 décembre suivant, sans aucune modification par lesquelles il semble que l’on ait voulu introduire une nouvelle doctrine inconnue non seulement aux auteurs qui ont traité de la noblesse, mais encore aux différentes cours souveraines qui ont eu souvent à prononcer sur des difficultés qui ont beaucoup de rapport à celles dont il s’agit ici.

Par l’article III de ces lettres patentes il est ordonné « que les anoblis ou ceux de leurs descendants nés dans les colonies, qui seront dans le cas de faire preuve de leur noblesse, seront tenus de rapporter, indépendamment de leurs lettres d’anoblissement ou titres constitutifs de leur noblesse & des titres & actes nécessaires pour justifier de leur filiation & possession de noblesse, un acte de notoriété du Conseil supérieur, dans le ressort duquel leur domicile sera établi, portant que les anoblis, depuis la date de leurs titres d’anoblissement, & leurs descendants n’auront exercé aucun état incompatible avec la noblesse dont ils seront revêtus ; qu’ils auront pris les qualités nécessaires pour la conserver ».

Il faut observer que cette loi n’est pas générale : elle est faite, uniquement & spécialement, pour les colonies : elle ne peut s’appliquer aux preuves de noblesse des habitants des provinces du Royaume ; pas même de ceux du ressort de la Cour des Aides de Paris qui l’a enregistrée. »

En fait, Antoine Maugard soutient que ces lettres sont rédigées uniquement en vue d’éviter les fraudes qui pourraient avoir lieu dans les colonies « un pays séparé du Royaume par dix-huit cents lieues de mer » et dans lequel le commerce est la principale occupation des habitants.
Cependant, estime notre généalogiste, cette loi ne stipule pas quelles sont les qualités nécessaires pour conserver la noblesse, et semble laisser la décision aux commissaires chargés de l’examen des preuves.

« Où les habitants des colonies apprendront-ils à connaître quelles sont ces qualités ? Aucun livre n’en parle : & la loi se tait ! …
[…]
… c’est dans les principes du droit commun & de la justice, dans la jurisprudence des cours, qu’il faut chercher la solution demandée. »

Prééminence de la vie noble :

« Une maxime certaine, qui est de tous les temps & de tous les pays, c’est que les droits du sang sont inviolables & que les ordonnances civiles ne peuvent jamais les détruire. Or la noblesse, que l’on appelle naturelle, qui est celle que l’on tient, par droit de naissance, de celui qui en jouissait, soit par bénéfice du prince ou de la loi, soit par une possession immémoriale, à laquelle on ne peut objecter une preuve de roture antérieure, cette noblesse, dis-je, est un droit du sang, un droit de même nature que celui de parenté. Par conséquent celui qui la possède ne peut jamais la perdre, ni l’aliéner : il ne peut pas même y renoncer par une convention particulière. »

En cela Maugard rejoint les principes défendus par son « rival » Chérin qui écrit dans le discours préliminaire de son « abrégé chronologique », à propos de la nécessité d’obtenir des lettres de réhabilitation en cas de dérogeance ou d’omission :
« Le plus grand nombre des Jurisconsultes pense même que la Noblesse d’ancienne extraction, sans principe connu, est une propriété inhérente à la race, qui contient en elle-même un caractère indélébile, et qu’altérée ou obscurcie par plusieurs degrés, elle se relève, de sa propre force, par les seules droits du sang. »

Et Maugard de continuer en affirmant que la vie noble prime sur les qualifications :
« Il semblerait donc que la noblesse, lorsqu’elle est certaine, & fondée soit sur un anoblissement quelconque, soit sur la possession immémoriale, ne peut s’éteindre que par une dérogeance réelle : & qu’une dérogeance, seulement présumée, n’est pas un motif suffisant pour faire déclarer roturier celui à qui elle peut être objectée.
On pourrait dire que si la possession de la qualité d’Écuyer, ou autre caractéristique de noblesse, ne suffit pas, seule, pour acquérir ou conserver la noblesse ; l’omission de cette qualité ne doit pas plus suffire pour la faire perdre. Or il est certain que ce n’est pas la qualité prise dans les actes qui confère ou conserve la noblesse, c’est la vie noble. Car, dans la supposition contraire, il n’y aurait jamais de dérogeance : un gentilhomme forcé à prendre l’état de procureur, de marchand ou autre pareil, ne manquerait pas de faire des actes secrets dans lesquels il aurait soin de cacher sa véritable qualité, pour ne montrer que celle d’écuyer. Aussi, lorsque les cours souveraines ont à juger sur l’état de quelqu’un dont la noblesse est équivoque, elles ne s’en tiennent pas aux titres seuls si l’on n’y voit que la qualité d’écuyer : elles ordonnent qu’il sera prouvé par témoins que ceux qui ont pris la qualité d’écuyer étaient réputés nobles, suivant la commune renommées ; qu’ils n’ont fait aucun acte dérogeant à la noblesse ; qu’ils ont vécu noblement. »

La cour des aides : Une doctrine

Maugard, pour appuyer sa thèse, s’en remet aux principes développés par la cour des aides qui soutient que lorsque la noblesse est certaine, l’omission de la qualité d’écuyer n’est point regardée comme une dérogeance, et qu’en de tels cas des lettres de relief ne sont pas nécessaires.
Aussi cite-t-il les affirmations énoncées dans les premières éditions du mémorial alphabétique de cette cour, au mot «Écuyer » :
« Ce n’est pas une dérogeance d’avoir omis de prendre la qualité d’écuyer ; en sorte qu’un noble, contre lequel on rapporterait des actes qu’il aurait passés sans cette qualité, ne serait pas nécessité d’obtenir des lettres de reliefs, si d’ailleurs il avait d’autres titres qui justifiassent sa noblesse. Mais faute d’autres titres & si la plupart de ceux qu’il rapporte lui même ne contiennent pas cette qualité, on le présume roturier ; parce que les nobles sont assez jaloux de cette qualité, pour ne la pas négliger : &, en ce cas, il faut qu’ils prennent des lettres de relief d’omission de ladite qualité. »

Et de continuer par les précisions ajoutées dans l’édition in-4° de 1742 :
« Cependant l’ancienne noblesse qui s’acquéroit autrement que par les services militaires, surtout par le service dans les Cours, ne prenait point la qualité d’écuyer, qui était peu convenable à son état, auquel néanmoins on n’a pu contester jamais les avantages de la noblesse transmissible. »

L’omission de la qualité d’écuyer : Le Conseil confirme.

En ce qui concerne le Conseil, Antoine Maugard rappelle que les « traitants », auxquels avait été vendue la « faculté indéfinie de tourmenter les nobles », avaient pris soin de notifier plusieurs fois leur avis sur la question, et que jamais ceux-ci n’avaient pu remettre en cause le fait que l’interruption de la qualification d’écuyer n’était nuisible.
Belleguise, l’un de ces traitants, écrit notamment, à propos des professions de juge royal, médecin ou avocat, que les descendants de ceux-ci ne pouvaient retirer préjudice de ces qualités et que :
« puisqu’un titre d’écuyer, qui n’est souvent qu’un nom de montre & de parade, leur pouvait conserver la noblesse ; celui de juge, de médecin, ou d’avocat, aussi glorieux qu’utile, ne devait pas la leur faire perdre, ou plutôt en affaiblir la preuve »

Et Maugard d’ajouter l’arrêt du Conseil du 4 juin 1668, qui se prononce ainsi :
« Le Roi, étant en son Conseil, a ordonné que, dans les titres qui seront produits par les particuliers assignés pour justifier de leur noblesse, la qualité de juge royal, d’avocat, ou de médecin, ne pourra estre réputée faire tige de noblesse, si elle n’est établie par une possession de qualité d’écuyer ou de noble : néanmoins, en cas que ladite qualité d’écuyer soit établie par titres authentiques & valables, celle de juge royal, d’avocat ou de médecin, seulement & sans qualité de noble ou d’Écuyer, ne sera point censée déroger. »

De cet arrêt, Maugard en conclut trois points décisifs :
« 1°. Que l’omission de la qualité de noble ou d’écuyer ne fait pas perdre la noblesse, lorsqu’elle est prouvée par titres authentiques & valables & seulement par une possession suffisante, antérieure à l’omission : 2°. Que l’omission d’une qualité noble ne fait perdre la noblesse, que lorsque celui qui a omis de la prendre a exercé un état incompatible avec la noblesse. 3°: Qu’il ne faut point de lettres de relief, puisqu’il autorise les commissaires à maintenir ceux qui se trouvent dans ce cas, sans mettre aucune différence entre la généalogie où il n’y a omission que sur un degré & celle où l’omission a été continuée pendant plusieurs générations. »

En outre, il étend ses positions non aux seules professions citées plus haut, mais à d’autres et notamment aux « emplois de finance ».

Conclusion : Le fondement de la noblesse est déterminant

Maugard se résume lui-même :
« Ier. CAS. De la noblesse fondée sur un anoblissement certain :
Elle est imprescriptible, elle ne peut se perdre que par la dérogeance: l’omission de qualité ne peut aucunement préjudicier ; & fût-elle continuée pendant cent ans & plus, il ne faut point de lettres de relief, lorsqu’il est prouvé que ceux qui ont oublié de prendre la qualité d’écuyer ont exercé un état compatible avec celui de la noblesse.
On peut en dire autant de la noblesse réputée d’ancienne chevalerie, quant à l’omission de qualité : il est certain qu’elle ne peut lui nuire en aucune manière. A l’égard de la dérogeance, il serait facile de prouver qu’il n’en est point qui puisse faire perdre la noblesse à un gentilhomme d’ancienne chevalerie ; mais cette question est étrangère à celle qui vient d’être agitée.

IIe. CAS. De la noblesse fondée sur la possession centenaire :
1°. L’omission de la qualité d’écuyer ne nuit point, & il ne faut point de lettres de relief, lorsqu’il est prouvé, par titres, que ceux qui ont oublié de prendre cette qualité n’ont pas cessé, pour cela, de jouir des privilèges de la noblesse, ou qu’ils ont exercé un état compatible avec elle ; parce qu’alors il est certain qu’il n’y a point eu de dérogeance.
2°. L’omission de la qualité d’écuyer pourrait nuire, & il faudrait des lettres de relief, s’il n’était pas prouvé clairement que ceux qui ne l’ont pas prise aient constamment joui des privilèges ou aient exercé un état compatible avec la noblesse : parce qu’alors il y aurait du doute sur leur état ; & ce doute ne peut être levé que par des lettres du prince. Ces lettres ne sont pas de grâce, mais de justice.
3°. L’omission de la qualité d’écuyer, continuée pendant cent ans, fait perdre la noblesse ; lorsqu’il est prouvé, par titres, que ceux qui ne l’ont pas prise ont payé les impositions roturières sans réclamation ; quand même ils auraient exercé un état compatible avec la noblesse : parce qu’alors la noblesse qui avait été acquise par le droit de la prescription est anéantie par le droit contraire, & l’on présume, avec raison que la possession de la qualité d’écuyer était une usurpation : de manière que des lettres de relief, même de dérogeance, ne suffiraient pas pour la rétablir. Il faut des lettres d’anoblissement. Comme ce sont des lettres de grâce, & qui dépendent absolument de la volonté du roi : on ne pourrait pas se flatter de les obtenir. »

Écuyer : Un titre ?

En examinant les diverses études réalisées, il paraît incontestable qu’au XVIIIe siècle et avant, le terme d’écuyer reflète uniquement une qualité et se différencie des autres titres de noblesse tels que baron, vicomte, comte, marquis, prince ou duc ; cela en dépit du fait que dans bien des textes l’expression «titre d’écuyer» est de nombreuses fois employée.
A ce propos, MM. Guérin citent notamment le discours préliminaire de Chérin, l’édit de mars 1600 (voir plus haut) faisant défense de «prendre sans droit le titre d’écuyer», une déclaration du 4 septembre 1696 ayant le même objet…
Mais nous pensons qu’en cela le mot « titre » est employé dans son sens original. Du latin « titulus » qui signifie notamment « inscription – titre d’honneur », « titre » doit être considéré alors comme une désignation honorifique, une dignité.
En outre, l’on s’aperçoit que quatre principaux points paraissent différencier, sous l’ancien régime, la qualification d’écuyer des titres de noblesse comme nous les entendons, sans pour autant les opposer.
Le premier d’entre eux, qui semble être une évidence, est que le terme d’écuyer, à l’inverse des titres, n’avait pas d’équivalent féminin. – Même si MM. Guérin indiquent dans leur ouvrage que le titre de demoiselle correspondait, pour le genre féminin, à la qualification d’écuyer, affirmation également développée par M. Alain Texier dans son ouvrage sur la noblesse :
« Les titres de dame ou de demoiselle, eux, ne sont plus portés aujourd’hui en France. Leur existence juridique est pourtant certaine. Demoiselle est l’équivalent féminin d’écuyer et dame celui de chevalier […] »

En deuxième lieu, contrairement au qualificatif d’écuyer, la dévolution d’un titre jusqu’à la Révolution, restait liée à la possession d’une terre érigée en fief de dignité par des lettres dûment enregistrées en parlement. Cela, même si bien souvent, ainsi que le soulignent la plupart des érudits auteurs d’ouvrages sur la noblesse, nombre de titres irréguliers furent portés dans la vie publique sans aucun empêchement, notamment au XVIIIe siècle.
Le troisième point est directement lié à la dévolution du « titre ». En effet, si « écuyer » était un titre à part entière, il ne serait transmissible que par ordre de primogéniture.
Enfin, quatrième et dernier point, si le titre exprimait une dignité particulière, une marque d’honneur, il venait, en complément du qualificatif d’écuyer ou de chevalier même si ces derniers n’étaient quelquefois plus alors cités : dans les preuves de noblesse pour la Grande Écurie, le bisaïeul de l’impétrant, est dit :
« Marc-Comte Bardon, écuyer, baron de Segonzac » ; son aïeul est dit : « François-Louis, chevalier, baron de Segonzac » ; enfin son père est dit : « Marc-Comte Bardon, baron de Segonzac. »

Dans les preuves de noblesse pour entrer à la Maison Royale de l’Enfant-jésus, Louis d’Aumale, aïeul de Marie-Charlotte est dit :
« écuyer, seigneur et vicomte du Mont de Notre-dame »

Comme on peut le constater, sous-entendu ou pas, le terme d’écuyer, ou celui de chevalier, restait la marque de noblesse. Le titre, quant à lui, était directement attaché à la terre, si l’on excepte au XVIIIe siècle les cas particuliers que constituent les titres à brevets.

Restait à savoir, si au XXe siècle, il serait envisageable de considérer le terme d’écuyer comme un titre à part entière, ou bien au contraire seulement et toujours comme marque de qualité.
Ainsi que l’écrit Hamoir «écuyer» est marque de qualité si l’on conçoit la noblesse comme étant elle-même une qualité. Or, à présent la noblesse n’est bien souvent comprise que seulement comme un titre d’honneur par lequel s’efforcent de se distinguer certains hommes des autres hommes.
Alors Hamoir d’écrire :
« … dans une société régie par des lois égalitaires, niant l’existence de conditions attachées à la naissance, la noblesse se réduit juridiquement à une distinction honorifique. Dès lors, une marque de noblesse n’est plus une marque de qualité, mais une marque d’honneur et elle devient un titre nobiliaire. »

Nous continuerons ce point particulier en rappelant qu’une décision du Ministère des Finances de 1817, fixe un droit de greffes concernant les « titres de marquis, vicomte et écuyer » et les considère comme semblables aux titres de comte, baron et chevalier.
La loi du 8 août 1947, estiment MM. Guérin, ayant repris les termes de l’ordonnance de 1817, cette décision reste encore en vigueur de nos jours. Alors, poursuivent ces auteurs :
« A défaut de lettres confirmatives de noblesse, le ministre de la justice aurait pu légalement prendre les arrêtés portant vérification du titre d’écuyer ; mais depuis 1830, les familles ne s’en sont guère souciées. »

Et pourtant… En 1959, M. N… demande au juge judiciaire la reconnaissance du titre d’écuyer attaché à la charge de son ancêtre :
« Un sieur N. ayant acquis une charge de conseiller-secrétaire du Roi en la chancellerie près le Parlement de Bordeaux en fait enregistrer les provisions le 21 décembre 1785. Le voici décoré du titre d’écuyer et, après vingt ans d’exercice, il a l’espoir de transmettre cette qualité à ses enfants. Mais arrive la Révolution et, de plus, il meurt en 1793. Son fils ne réagit pas sous la Restauration et un lointain descendant direct demande aux tribunaux de l’inscrire dans l’état civil sous les appellations de messire et d’écuyer. »
[…]
« Pour justifier sa demande, le requérant faisait valoir qu’écuyer est un titre et que le titre est la propriété d’une famille, une fois concédé. »

Mais la cour de Douai s’est déclarée incompétente par un arrêt du 19 octobre de la même année, au motif que :
« Si les tribunaux judiciaires sont compétents pour statuer sur les questions relatives à la dévolution et à la transmission des titres contestés ou sur leur revendication, par contre, il appartient, exclusivement, à l’autorité administrative de se prononcer sur la validité, la vérification, le sens et la portée des actes souverains de collation ou de confirmation des titres nobiliaires lorsque leur interprétation ou leur existence est sujette à discussion ».

Aussi, M. N… s’est-il alors adressé au garde des Sceaux afin d’obtenir son inscription sur les registres du Sceau de France comme ayant succédé au titre d’écuyer de son ancêtre.
Mais, par un arrêté du 17 mars 1989, le ministre de la Justice ayant décidé qu’il n’y avait pas lieu de prendre en considération la demande de M. N… pour la vérification du titre d’écuyer, un jugement du tribunal administratif du 10 février 1994 répond sans ambiguïté à cette question et clôt définitivement, semble-t-il, ce point.:

« Vu, le décret du 30 septembre 1953 portant réforme du contentieux administratif, le décret du 28 novembre 1953 portant règlement d’administration publique pour l’application du décret du 30 septembre 1953 ; le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ; Vu la loi N° 86-14 du 6 janvier 1986, et, notamment, son article 18 s ;…

Sur la compétence du tribunal administratif de Paris :
[…]… le tribunal administratif de Paris est compétent pour connaître du recours de M. N… dirigé contre cette décision ;

Sur le bien-fondé de l’arrêté attaqué :
Considérant que pour demander l’inscription du titre d’écuyer sur les registres du Sceau de France, M. N… soutient que celui-ci est un titre de dignité semblables aux titres de duc, marquis, comte, vicomte et barons habituellement inscrits et que la circonstance qu’aucune demande en ce sens n’ait été présentée depuis 1830 ne fait pas obstacle à sa vérification ; que son ancêtre Jean-Baptiste N…, […], était bien revêtu de ce titre dès sa réception dans sa charge de conseiller-secrétaire du roi Maison et Couronne de France en la chancellerie près le parlement de Bordeaux et que ce titre était transmissible bien que le dénommé Jean-Baptiste n’ait pas exercé son office pendant vingt années ;
Considérant que dans l’ancien droit nobiliaire français un titre de dignité était, sauf coutumes locales ou dispense d’érection de fief, assis sur un fief et propriété du seul chef de famille ; que seuls ces titres de dignité sont susceptibles d’être inscrits sur les registres du Sceau de France en tant qu’accessoire honorifique du nom ; que le titre d’écuyer était, en revanche, un titre indépendant de toute possession de terre et transmis à tous les membres masculins d’une famille ; qu’il était, dès lors, lié à la qualité des personnes, qu’elles fussent nobles ou titulaires d’offices conférant certains privilèges de la noblesse ; qu’un tel titre qui ne saurait être regardé comme un accessoire honorifique du nom, n’est pas susceptible d’être inscrit sur les registres du Sceau de France ;
Considérant au surplus qu’en admettant même que le titre d’écuyer ait été conféré à son ancêtre en même temps que la noblesse, le requérant ne saurait utilement soutenir que ce titre aurait été transmis dès cette date héréditairement à tous les enfants et héritiers mâles nés et à naître de M. Jean-Baptiste N…. dès lors que, l’abolition de la noblesse et des titres nobiliaires par lettres patentes de Louis XVI données le 23 juin 1790 ne constituant pas un cas de force majeure, la condition d’avoir exercé son office pendant une durée de vingt ans pour pouvoir transmettre cette qualité à ses héritiers n’est pas remplie ; qu’il suit de là que la requête de M. N…, qui tend à l’annulation de l’arrêté du 17 mars 1989 du ministre de la Justice décidant qu’il n’y avait pas lieu de prendre en considération sa demande de vérification du titre d’écuyer, doit être rejetée ; …[rejet]

(Mme Vettraino, rapporteur ; M. Coutau-Bégarie, commissaire du gouvernement)

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DICTIONNAIRE DES OFFICIERS DE L’ARMÉE ROYALE QUI ONT COMBATTU AUX ÉTATS-UNIS

INTRODUCTION

Ce dictionnaire qui comporte plusieurs dizaines de noms nouveaux d’officiers, dont on ignorait jusqu’alors le rôle et même l’existence, ne prétend cependant pas être complet et sans erreurs. Mais certaines omissions ne sont pas des oublis, seuls les officiers qui ont combattu sur le sol des États-Unis ont été étudiés et non tous ceux qui ont pris part à la guerre d’Amérique. On y a fait figurer également un certain nombre d’officiers à qui on a accordé le bénéfice du doute, mais qui n’étaient peut-être pas à Savannah ou à Yorktown avec leur régiment. On y trouvera également des notices sur des volontaires qui servaient dans l’attente d’un emploi d’officier, des aspirants du génie et sur quelques jeunes gens qui n’avaient pas servi dans l’armée royale, mais qui ont été nommés officiers après avoir combattu dans les rangs des insurgents ; les sous-officiers nommés officiers après leur passage aux États-Unis n’ont pas été étudiés. On a indiqué, dans un supplément à la suite de ce dictionnaire, les volontaires qui ont servi dans l’armée américaine, non officiers dans l’armée française, qui ne figurent pas dans l’ouvrage du commandant Lasseray, et que le hasard nous a permis de connaître.

Les officiers étudiés appartiennent à deux groupes distincts :

 

1) Les officiers qui ont servi comme volontaires dans l’armée américaine, qui sont un peu plus d’une centaine, et dont le nom est précédé d’un astérisque.

2) Les officiers des différents corps expéditionnaires, qui sont près d’un millier :
– Le corps expéditionnaire de d’Estaing, qui a combattu à Savannah en octobre 1779, était constitué par des unités venues de France (bataillons de Foix et de Hainaut), et par un grand nombre de détachements prélevés dans les régiments qui stationnaient aux Antilles ou à Saint-Domingue : Agenois, Armagnac, Auxerrois, Cambrésis, Champagne, Dillon, Gâtinais, Walsh, Belsunce-dragons, Condé-dragons, Metz-artillerie, Martinique, Guadeloupe, Le Cap, Port-au-Prince, grenadiers et chasseurs volontaires de Saint-Domingue, volontaires de Valbel, auxquels il faut ajouter les officiers d’état-major et des officiers volontaires (environ 285 officiers).
– Le corps de Rochambeau est arrivé aux États-Unis en juillet 1780 et a quitté le sol américain en décembre 1782, mais des officiers ont regagné la France après le siège de Yorktown et d’autres ne sont arrivés aux États-Unis qu’en septembre 1782. Il était constitué par les régiments d’infanterie de Bourbonnais, de Saintonge, de Soissonnais et de Royal Deux-Ponts, par la légion de Lauzun, dont la plus grande partie était montée, et par un bataillon du régiment d’Auxonne-artillerie. Ce corps expéditionnaire comportait un important état-major avec des officiers d’état-major, de très nombreux aides de camp, des officiers d’artillerie et du génie (496 officiers identifiés).
– Le corps de Rochambeau a été renforcé au moment du siège de Yorktown, en septembre-octobre 1781, par la division du marquis de Saint-Simon qui comprenait les régiments d’Agenois, Gâtinais et Touraine, un détachement d’artillerie du régiment de Metz et un corps de volontaires commandé par le baron de Saint-Simon (environ 214 officiers).
– Vingt-sept officiers appartenant à des détachements des régiments d’Angoumois, Bourbon, Bresse, Brie, Colonel Général, La Sarre, Maine, Monsieur, Picardie et Rohan, qui étaient en garnison des vaisseaux de la flotte de l’amiral de Grasse, ont pris part au siège de Gloucester avec la légion de Lauzun, pendant que l’essentiel des forces franco-américaines attaquait Yorktown.
– Dix-neuf officiers ont participé au siège de Pensacola dans le cadre d’une action franco-espagnole de mars à mai 1781. Ils appartenaient à des détachements des régiments d’Agenois, Cambrésis, Gâtinais, Orléans, Poitou et Metz-artillerie. La plupart d’entre eux ont ensuite pris part au siège de Yorktown.
L’effectif total des officiers des corps expéditionnaires qui ont combattu aux États-Unis est légèrement inférieur à la somme des effectifs des officiers des différents corps expéditionnaires, car plusieurs volontaires qui ont servi dans l’armée américaine ont également fait partie du corps de Rochambeau et quelques officiers ont pris part au siège de Savannah et également à celui de Yorktown. On arrive à un effectif total de 1 034 officiers environ.

Ce dictionnaire est destiné à remplacer ou à compléter les ouvrages suivants :

 

– Balch (Thomas), The French in America during the War of Independence, Philadelphie, vol. 2, 1895, 252 p. Les notices de cet ouvrage comportent parfois des erreurs et il y a de nombreuses omissions, mais ce livre a le mérite d’avoir ouvert la voie.
– Les combattants Français de la Guerre américaine (1778-1783), cet ouvrage publié par le ministère des Affaires étrangères en 1903, contient des listes d’officiers, de soldats et de marins. On n’y trouve guère que la moitié des officiers qui ont combattu aux États-Unis, il y manque notamment la légion de Lauzun et les officiers d’une douzaine d’unités qui étaient à Savannah. En revanche on y a fait figurer quelques dizaines d’officiers des régiments de Walsh et de Metz-artillerie qui n’ont jamais combattu aux États-Unis.
– Contenson (Baron Ludovic de), La Société du Cincinnati de France et la guerre d’Amérique (1778-1783), 1934, 311 p. Cet ouvrage est bien documenté et son information est sûre, on y trouve les notices biographiques des officiers qui ont obtenu la décoration de l’ordre de Cincinnatus – il y a cependant des omissions. Notre dictionnaire ne recoupe que très incomplètement ce livre qui contient aussi de très nombreuses notices sur des officiers de marine et des officiers qui ont fait la guerre d’Amérique sans avoir combattu aux États-Unis.
– Lasseray (Commandant André), Les Français sous les treize étoiles, 1935, 2, vol., 684 p. Cet ouvrage contient des notices biographiques sur les volontaires qui ont combattu dans l’armée américaine. Il repose sur des recherches minutieuses, mais néanmoins un certain nombre d’officiers n’ont pu être identifiés par le commandant Lasseray. Si nous avons pu compléter cet ouvrage, il est également sûr que plusieurs officiers qui ont combattu dans les rangs des insurgents nous ont également échappé.
– Dawson (Warrington), Les 2112 morts Français aux États-Unis de 1778 à 1783, 1936, 154 p. Cet ouvrage, il s’agit seulement d’une liste, complète utilement le livre qui a été publié en 1903 par le ministère des Affaires étrangères.
Des revues régionales ont également fait paraître des listes et des études sur les officiers originaires de leur province ayant pris part à la guerre d’Amérique, mais elles ne font guère que reprendre les ouvrages qui précèdent et apportent en général peu d’éléments nouveaux.

 

Les notices biographiques comportent trois parties distinctes :

 

1) Des renseignements sur la famille. Nous y avons fait figurer le maximum d’indications sur l’officier et sa femme, sur le nombre, la date de naissance et les prénoms des enfants. En revanche, les renseignements sur les parents, éventuellement les grands-parents, sont plus sommaires. Nous avons renoncé à mentionner tous les collatéraux, notamment parce que plusieurs dizaines d’officiers avaient une douzaine et plus de frères et de sœurs. Nous nous sommes en général bornés à citer les frères officiers, quand ils n’étaient pas trop nombreux.

 

2) Une description de la carrière militaire et éventuellement politique. Les états de service des officiers ont été légèrement abrégés, on n’a indiqué que la nomination de lieutenant et de capitaine qui correspond à la première nomination à ce grade, alors que certains officiers ont été lieutenant en second, puis en premier, capitaine en second, puis capitaine commandant, etc. Les références données permettent de retrouver facilement les états de service complets des officiers et d’obtenir des renseignements complémentaires sur eux.

3) Les références bibliographiques.

 

a) Références des sources d’archives.

Elles figurent sous forme de sigles :
S.H.A.T. : Service historique de l’Armée de Terre (château de Vincennes).
Nous n’avons fait figurer que les principales références, on n’y trouvera pas par exemple celles des archives administratives des régiments – sous-séries Xb (infanterie), Xc (cavalerie), Xd (artillerie) -, qui sont surtout utiles dans le cadre d’une étude générale, et qui nous ont apporté des éléments précis sur le comportement politique des officiers, mais dont l’exploitation pour des cas individuels pourrait apparaître comme difficile ou décevante.
Yb : il s’agit des registres matricules des corps qui donnent les états de service des officiers, qui n’ont pas tous un dossier individuel.
Travail du roi (sous-série Yd) : concerne la nomination au grade d’officier, ce fonds est classé dans l’ordre chronologique des nominations.
Trésor royal (sous-série 1 Yf) : correspond à un brevet de pension.
Dossier Ancien Régime (sous-série 1 Ye) : dossiers des officiers qui ont quitté l’armée avant la Révolution.
Dossiers individuels 1791-1847 (sous-série Ye) : dossiers des officiers qui ont servi pendant la Révolution ou en émigration.
Pensions 1801-1817 et 1818-1856 (sous-séries 2 et 3 Yf) : dossiers de pensions militaires des officiers.
Les références concernant certaines catégories particulières d’officiers, comme les commissaires des guerres, les généraux nommés en émigration, ont été données avec les précisions nécessaires pour retrouver les dossiers de ces officiers dans les diverses sous-séries où ils se trouvent.
A.N. :Archives nationales.
Les principaux fonds utilisés sont les séries D2C (registres matricules), E et EE Colonies, où l’on trouve les dossiers des officiers qui ont servi dans les colonies qui sont aujourd’hui à Aix-en-Provence (Centre des archives de la France d’Outre-Mer) et la série C7 Marine pour les officiers de la marine royale et celle de commerce. La série AD III contient des dossiers d’officiers qui ont servi dans les armées républicaines à l’époque de la Révolution. Les références de la série AF II, dont le contenu est analogue à celui des sous-séries Xb, Xc et Xd du Service historique, n’ont pas été indiquées pour les mêmes raisons.
A.D. : Archives départementales.
Il s’agit essentiellement d’extraits baptistaires et mortuaires.
B.N.F. : Bibliothèque nationale de France.
Ont été utilisés les collections du Cabinet des titres : d’Hozier, Chérin, Dossiers bleus, pièces originales et les preuves de noblesse des écoles militaires : Manuscrits français n°32 060 à 32 099.

b) Ouvrages imprimés.

 

Nous n’avons indiqué que les principales publications permettant de connaître les officiers. Bien que ceux-ci n’apparaissent pas toujours dans certains nobiliaires ou dans des notices généalogiques, nous avons néanmoins donné les références de ces ouvrages quand ils donnaient d’utiles renseignements sur la famille de l’officier.
Les indications sur les familles présentées à la cour sont tirées de l’ouvrage de M. François Bluche, Les honneurs de la cour, 1957, et celles sur la franc-maçonnerie des ouvrages de M. Alain Le Bihan, Francs-maçons parisiens du Grand Orient de France, 1966 ; Loges et chapitres de la Grande Loge et du Grand Orient de France, 1967 ; Francs-maçons et ateliers parisiens de la Grande Loge de France au XVIIIe siècle, 1973 ; et aux listes de M. Jean Bossu conservées au Service historique dans le fonds 1 K 19.