HISTOIRE DE L’ORDRE ROYAL & MILITAIRE DE SAINT-LOUIS
Louis XIV résolut d’instituer un nouvel ordre de chevalerie. C’était un genre de gloire auquel un monarque tel que lui devait se montrer sensible. Cette création, destinée à récompenser des services rendus sur le champ de bataille, allait devenir le complément des belles institutions qu’on devait au génie de Louis Le Grand.
Les idées qui dominaient alors la société commandaient que l’on plaçât le nouvel ordre sous les auspices de la religion. Ce fut une très belle conception que celle de choisir dans les propres ancêtres du monarque régnant un saint dans la vie duquel se fussent confondus les actes de piété avec des traits de valeur. L’histoire de Louis IX présentait l’heureux assemblage des exploits du héros et des vertus qui devaient lui mériter d’être rangé parmi les bienheureux. Enfin le nom du patron était le même que celui du fondateur. Ceci devait imprimer à la nouvelle décoration un caractère national que n’avaient point les autres ordres de l’Europe.
Louis XIV, menacé par une puissante ligue que des revers successifs ne semblaient nullement rebuter, sentait le besoin de ne rien épargner pour exalter les sentiments de l’armée ; il commença par créer, le 27 mars 1693, sept maréchaux de France, qui furent MM. de Choiseul, de Villeroi, de Joyeuse, de Boufflers, de Tourville, de Noailles et Catinat. Le jour même où cette nomination occupait toutes les imaginations dans les salons de Versailles, le roi annonça comme très prochaine l’institution d’un ordre militaire. En effet un édit de création fut rendu le 5 avril, et enregistré en parlement le 10 du même mois. Le considérant est empreint d’un air de grandeur que l’on remarque dans les divers actes de ce règne mémorable.
« Louis, par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre, à tous présents et à venir, salut.
Les officiers de nos troupes se sont signalés par tant d’actions considérables de valeur et de courage, dans les conquêtes dont il a plu a Dieu de bénir la justice de nos armes, que, les récompenses ordinaires ne suffisant pas à notre affection et à la reconnaissance que nous avons de leurs services, nous avons cru devoir chercher de nouveaux moyens pour récompenser leur zèle et leur fidélité.
C’est dans cette vue que nous nous sommes proposé d’établir un nouvel ordre purement militaire, auquel, outre les marques d’honneur extérieures qui y sont attachées, nous assurerons, en faveur de ceux qui y seront admis, des revenus et des pensions qui augmenteront à proportion qu’ils s’en rendront dignes par leur conduite.
Nous avons résolu qu’il ne sera reçu dans cet ordre que des officiers encore dans nos troupes, et que la vertu, le mérite et les services rendus avec distinction dans nos armées seront les seuls titres pour y entrer. Nous apporterons même dans la suite une application particulière à augmenter les avantages de cet ordre, en sorte que nous aurons la satisfaction d’être toujours en état de faire des grâces aux officiers, et que, de leur coté, voyant des récompenses assurées à la valeur, ils se porteront de jour en jour avec une nouvelle ardeur à tâcher de les mériter par leurs actions.
A ces causes, de l’avis de notre conseil, et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, nous avons créé, institué et érigé, par ces présentes, un ordre militaire sous le nom de Saint-Louis, et sous la forme, statuts, ordonnances et règlements qui ensuivent.