L’étude de l’exercice par une famille de la noblesse romaine de ses droits seigneuriaux représente un observatoire privilégié des rapports de pouvoir sous l’Ancien Régime. L’acquisition par la famille pontificale des Borghese d’un important patrimoine foncier dans le Latium au cours du XVIIe siècle et les droits juridictionnels étendus qu’elle détient dans ses fiefs révèlent tout d’abord le caractère incomplet du processus de centralisation administrative dans l’état pontifical, qui est lié au phénomène du népotisme; mais l’analyse met également en lumière le caractère négocié de l’autorité seigneuriale. En étudiant tour à tour le personnel administratif employé par les Borghese, le recours des sujets aux tribunaux seigneuriaux, les rapports clientélistes noués avec les familles de notables, les luttes de factions, on montre l’instrumentalisation du seigneur dans les conflits locaux et le rôle de médiation joué par les élites des fiefs entre les Borghese et leurs sujets, mais aussi l’utilisation par les Borghese et les autorités concurrentes des actions des sujets. On restitue ainsi la complexité du jeu politique sous l’Ancien Régime.