La Glorieuse Révolution, qui voit en 1688-1689 le roi Jacques II s’exiler en France, puis sa fille Marie et son gendre, le chef militaire hollandais Guillaume d’Orange, accéder conjointement au trône, est souvent considérée comme le moment fondateur de la monarchie constitutionnelle britannique. On la décrit comme glorieuse, car elle serait advenue sans effusion de sang, sans un soulèvement populaire qui aurait pu plonger le royaume dans la guerre civile et car elle aboutit rapidement à un nouveau consensus politique rééquilibrant les pouvoirs de la Couronne et du Parlement. Cette révolution conservatrice, essentiellement motivée par une défense réactionnaire de l’église d’Angleterre face à un roi catholique et qui n’aurait pas eu lieu sans ce qui n’est ni plus ni moins qu’une invasion militaire néerlandaise, est une » révolution de palais », un coup d’état dynastique qui ne redéfinit pas de manière systématique la constitution de l’état. Cet ouvrage adopte une perspective plus large dans l’espace et dans le temps, d’abord en ne se limitant pas au point de vue anglais mais en englobant à la fois l’impact des événements irlandais et écossais et en prenant la dimension géopolitique européenne (essentiellement les rapports avec la France et la Hollande) ; ensuite en considérant que la révolution s’inscrit dans la continuité de la première révolution des années 1640-1650 et qu’elle ne se termine pas en 1689, mais se déploie et continue de se redéfinir pendant la décennie du règne de Guillaume III. L’image que l’on obtient est une révolution à la fois plus conflictuelle et plus violente, mais également une révolution qui a radicalement transformé le fonctionnement des institutions et mené à la naissance d’un état bureaucratique, fiscal et militaire moderne qui allait faire de la Grande-Bretagne une puissance de premier plan au XVIIIe siècle