Qui est donc Guillaume de Beaujeu, lorsque, en 1273, âgé d’une quarantaine d’années, il est élevé à la dignité de grand-maître de l’ordre du Temple, ce qui l’amènera à rejoindre Acre en Terre sainte ? Apparenté à tout ce que l’Europe comptait de souverains, élevé dans l’esprit de croisade, c’est d’abord un guerrier, un homme d’action ; mais aussi un homme de réseaux : il entretiendra d’excellentes relations avec le pape, des échanges avisés avec les cités italiennes, et surtout une étonnante proximité avec le sultan mamelûk et les émirs de son entourage, où il compta un grand nombre d’amis fidèles, et autant d’espions. Vingt ans plus tard, cependant, un ultime assaut allait avoir raison de la forteresse d’Acre, dernière capitale du royaume latin. Beaujeu participa activement aux combats de défense, menant des sorties de jour et de nuit, avant de trouver la mort sur les remparts. La ville tomba le jour même où il fut tué : l’annonce de sa fin avait jeté l’épouvante et le découragement dans la population et jusque dans les rangs de l’armée. Éclipsé depuis par le sort tragique de son successeur Jacques de Molay, qui mourut sur le bûcher par ordre de Philippe le Bel, il mérite pleinement qu’une biographie lui soit aujourd’hui consacrée, son destin étant intimement mêlé aux grands bouleversements géopolitiques de la fin du XIIIe siècle.