Les 298 lettres de Charles de La Motte (vers 1667-1751) constituent le volet le plus riche des papiers de Des Maizeaux (Add, Mss 4281-4289) conservés au département des manuscrits de la British Library à Londres. Dès le début de son établissement en Angleterre, Pierre Des Maizeaux (1673-1745) a dû se rendre compte qu’une relation avec un correspondant jouant un rôle-clé dans la librairie de Hollande, ce « magasin de l’univers », lui était indispensable. Le jeune lettré huguenot Charles de La Motte s’était réfugié dans les Provinces-Unies, où il s’installa en 1689 à Amsterdam, y trouvant bientôt sa place dans le milieu des libraires. En offrant ses services à ces derniers, il réussit à assurer sa subsistance notamment comme correcteur et agent d’édition. Ainsi se mit-il au service de nombreux auteurs, d’où sa réputation de « courtier littéraire ». Les lettres de Charles de La Motte échangées avec Des Maizeaux s’étendent sur une période de plus de 40 ans, de 1700 à 1744, et nous offrent un regard varié non seulement sur la librairie de Hollande, mais aussi sur les pratiques d’édition et sur la collaboration d’un côté et de l’autre de la Manche dans la première moitié du siècle des Lumières. On y trouve plus particulièrement une information abondante sur les grandes éditions de Pierre Bayle, de Saint-Évremond et de Nicolas Boileau, ainsi que sur la traduction et sur le transfert de la nouvelle philosophie empiriste et de la pensée anglaise en Europe au cours des premières décennies du XVIIIe siècle. Enfin, ce dossier des lettres de La Motte, qui contient aussi une dizaine de lettres de Pierre Des Maizeaux, donne accès aux « coulisses de la presse de la langue française dans les Provinces- Unies » et permet d’observer de près l’apport de deux acteurs centraux de l’époque à la presse et au journalisme de Hollande du XVIIIe siècle.